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author | Christian Grothoff <christian@grothoff.org> | 2020-10-11 13:29:45 +0200 |
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Cependant, ils disent des choses profondément +différentes sur ces logiciels, car ils se basent sur des valeurs +différentes. Le mouvement du logiciel libre fait campagne pour la liberté +des utilisateurs de l'informatique ; c'est un mouvement qui lutte pour la +liberté et la justice. L'idéologie open source, par contre, met surtout +l'accent sur les avantages pratiques et ne fait pas campagne pour des +principes. C'est pourquoi nous ne sommes pas d'accord avec l'open source et +n'utilisons pas ce terme. +</p></blockquote> + +<p>Quand on dit qu'un logiciel est « libre » <cite>[free]</cite>, on entend par +là qu'il respecte <a href="/philosophy/free-sw.html">les libertés +essentielles de l'utilisateur</a> : la liberté de l'utiliser, de l'étudier, +de le modifier et d'en redistribuer des copies, modifiées ou non. C'est une +question de liberté, pas de prix – pensez à « liberté d'expression » et pas +à « entrée libre » <cite>[think of “free speech”, not “free beer”]</cite>.<a +id="TransNote1-rev" href="#TransNote1"><sup>1</sup></a></p> + +<p>Ces libertés sont d'une importance vitale. Elles sont essentielles, pas +uniquement pour les enjeux individuels des utilisateurs, mais parce qu'elles +favorisent le partage et la coopération qui fondent la solidarité +sociale. Elles prennent encore plus d'importance alors que notre culture et +nos activités quotidiennes se numérisent. Dans un monde de sons, d'images et +de mots numériques, le logiciel libre devient de plus en plus nécessaire +pour la liberté en général.</p> + +<p>Des dizaines de millions de personnes de par le monde utilisent maintenant +le logiciel libre ; les écoles publiques de quelques régions d'Inde et +d'Espagne enseignent à tous les élèves l'utilisation du <a +href="/gnu/linux-and-gnu.html">système d'exploitation libre +GNU/Linux</a>. Mais la plupart des utilisateurs n'ont jamais entendu parler +des raisons éthiques pour lesquelles nous avons développé ce système et bâti +la communauté du logiciel libre, parce qu'aujourd'hui ce système et la +communauté sont le plus souvent décrits comme « open source »<a +id="TransNote2-rev" href="#TransNote2"><sup>2</sup></a> et attribués à une +philosophie différente dans laquelle ces libertés sont à peine mentionnées.</p> + +<p>Le mouvement du logiciel libre fait campagne pour la liberté des +utilisateurs de l'informatique depuis 1983. En 1984 nous avons lancé le +développement du système d'exploitation libre GNU, afin de pouvoir éviter +les systèmes d'exploitation non libres qui refusent la liberté à leurs +utilisateurs. Durant les années 80, nous avons développé la majeure partie +des composants essentiels de ce système et conçu la <a +href="/licenses/gpl.html">licence publique générale GNU </a> (GNU <abbr +title="General Public License">GPL</abbr>), une licence destinée +spécifiquement à protéger la liberté de tous les utilisateurs d'un +programme.</p> + +<p>Cependant, tous les utilisateurs et développeurs de logiciel libre n'étaient +pas en accord avec les buts du mouvement du logiciel libre. En 1998, une +partie de la communauté du libre a formé un groupe dissident et commencé à +faire campagne au nom de l'« open source ». Cette dénomination fut proposée +à l'origine pour éviter une possible incompréhension de <cite>free +software</cite>, mais on l'associa bientôt à des points de vue +philosophiques complètement différents de ceux du mouvement du logiciel +libre.</p> + +<p>Certains des partisans de l'open source considéraient cela comme « une +campagne marketing pour le logiciel libre » qui séduirait les cadres des +entreprises en mettant en relief ses avantages pratiques, tout en évitant +les idées de bien et de mal que ces cadres pouvaient ne pas +apprécier. D'autres partisans rejetaient catégoriquement les valeurs morales +et sociétales du mouvement du logiciel libre. Quel que fût leur point de +vue, ils n'ont ni mentionné ni préconisé ces valeurs pendant leur campagne +pour l'open source. On associa rapidement « open source » à des idées et des +arguments basés sur des valeurs utilitaires comme la fabrication ou la +possession de logiciels puissants et fiables. La plupart des défenseurs de +l'open source se sont depuis ralliés à ces idées et ils continuent à faire +cette association. La plupart des discussions sur l'open source ne +s'intéressent pas au bien et au mal, seulement à la popularité et au +succès. En voici <a +href="http://www.linuxinsider.com/story/Open-Source-Is-Woven-Into-the-Latest-Hottest-Trends-78937.html"> +un exemple typique</a>. Il est vrai qu'une minorité de partisans de l'open +source disent maintenant que la liberté est en jeu, mais ils ne sont pas +très visibles parmi ceux qui disent le contraire.</p> + +<p>Les deux expressions décrivent à peu près la même catégorie de logiciel, +mais elles représentent des points de vue basés sur des valeurs +fondamentalement différentes. L'open source est une méthodologie de +développement ; le logiciel libre est un mouvement de société. Pour le +mouvement du logiciel libre, ce dernier représente un impératif éthique, +l'indispensable respect de la liberté de l'utilisateur. La philosophie de +l'open source, pour sa part, envisage uniquement les enjeux pratiques, en +termes de performance. Elle dit que le logiciel non libre est une solution +sous-optimale au problème pratique à résoudre.</p> + +<p>Pour le mouvement du logiciel libre, au contraire, le logiciel non libre est +un problème sociétal, et la solution consiste à cesser de l'utiliser et à +migrer vers le logiciel libre.</p> + +<p>« Logiciel libre ». « Open source ». Si ce sont les mêmes logiciels (<a +href="/philosophy/free-open-overlap.html">ou presque</a>), le nom utilisé +pour les qualifier est-il important ? Oui, parce que des mots différents +véhiculent des idées différentes. Bien qu'un programme libre, si on +l'appelle autrement, vous donne la même liberté aujourd'hui, établir la +liberté de manière durable exige comme condition première d'enseigner la +valeur de la liberté. Si vous voulez y contribuer, il est essentiel de +parler de « logiciel libre ».</p> + +<p>Nous qui militons au mouvement du logiciel libre, nous ne considérons pas le +camp de l'open source comme un ennemi ; l'ennemi est le logiciel +privateur.<a id="TransNote3-rev" href="#TransNote3"><sup>3</sup></a> Mais +nous voulons faire savoir aux gens que nous défendons la liberté, c'est +pourquoi nous n'acceptons pas d'être incorrectement assimilés aux partisans +de l'open source. Ce que nous défendons n'est pas le code source « ouvert » +<cite>[open source]</cite>, et ce que à quoi nous nous opposons n'est pas le +code source « fermé » <cite>[closed source]</cite>. Pour éviter les +malentendus, nous évitons ces deux termes. +</p> + +<h3>Différences pratiques entre logiciel libre et open source</h3> + +<p>En pratique, l'open source défend des critères un peu moins stricts que ceux +du logiciel libre. À notre connaissance, le code source de tous les +logiciels libres publiés existants répond aux critères de l'open +source. Presque tous les logiciels open source sont des logiciels libres, +mais il y a des exceptions. D'abord, certaines licences open source sont +trop restrictives, donc se disqualifient en tant que licences libres. Par +exemple, « Open Watcom » est non libre parce que sa licence ne permet pas +d'en faire une version modifiée et de l'utiliser en privé. Heureusement, les +programmes utilisant ces licences sont rares.</p> + +<p>De plus, lorsque le code source d'un programme a une licence faible, sans +copyleft, des conditions supplémentaires non libres peuvent être ajoutées à +la licence de ses exécutables. C'est ce que fait Microsoft avec <a +href="https://code.visualstudio.com/License/">Visual Studio</a>, par +exemple.</p> + +<p>Si ces exécutables correspondent exactement aux sources publiées, ils +répondent aux critères de l'open source, mais pas à ceux du logiciel +libre. Cependant, les utilisateurs peuvent dans ce cas recompiler les +sources en exécutables libres et distribuer ces derniers.</p> + +<p>Enfin, le plus important en pratique est que beaucoup de produits +manufacturés embarquant des ordinateurs vérifient les signatures de leurs +programmes exécutables de manière à empêcher les utilisateurs d'installer +des exécutables différents ; seule une entreprise agréée peut faire des +exécutables pouvant fonctionner dans l'appareil ou accéder à l'ensemble de +ses capacités. Nous donnons à ces appareils le nom de « tyrans », et la +pratique en question s'appelle « tivoïsation » d'après le produit (Tivo) +dans lequel nous l'avons observée pour la première fois. Même si +l'exécutable provient d'un code source libre, les utilisateurs ne peuvent +pas en faire fonctionner de version modifiée ; l'exécutable n'est donc pas +libre, de fait.</p> + +<p>De nombreux produits sous Android contiennent des exécutables de Linux +tivoïsés, bien que la licence de leur code source soit la GNU GPL +(version 2). Nous avons fait en sorte d'interdire cette pratique dans la +version 3.</p> + +<p>Les critères de l'open source s'intéressent uniquement à la licence du code +source. Par conséquent ces exécutables non libres, quand ils sont obtenus à +partir d'un code source comme Linux, qui est open source et libre, sont open +source mais non libres.</p> + +<h3>Malentendus courants sur le « logiciel libre » et l'« open source »</h3> + +<p>L'expression <cite>free software</cite> souffre d'un problème de mauvaise +interprétation : une signification fortuite, « un logiciel que vous pouvez +avoir gratuitement », lui correspond aussi bien que la signification voulue, +« un logiciel qui donne certaines libertés à l'utilisateur ». Nous traitons +ce problème en publiant la définition du logiciel libre et en disant : +<cite>think of “free speech”, not “free beer”.</cite> Ce n'est pas une +solution parfaite, cela ne peut pas complètement éliminer le problème. Une +expression correcte non ambiguë serait meilleure si elle n'avait pas +d'autres problèmes.</p> + +<p>Malheureusement, toutes les dénominations alternatives en anglais ont leurs +problèmes. Nous avons étudié un grand nombre de suggestions, mais aucune ne +s'impose assez clairement pour qu'il soit souhaitable de l'adopter (par +exemple, le mot français ou espagnol « libre » peut être utilisé dans +certains contextes, mais en Inde les gens ne le reconnaissent pas du +tout). Toutes les expressions suggérées pour remplacer <cite>free +software</cite> ont des problèmes sémantiques, y compris <cite>open source +software</cite>.</p> + +<p>La <a href="https://opensource.org/osd">définition officielle du « logiciel +open source »</a> (publiée par l'<cite>Open Source Initiative</cite> et trop +longue pour être citée ici) dérive indirectement de nos critères pour le +logiciel libre. Elle est différente, car un peu plus laxiste à certains +égards. Néanmoins, cette définition est en accord avec la nôtre dans la +plupart des cas.</p> + +<p>Cependant, la signification évidente de « logiciel open source » est « vous +pouvez regarder le code source » et c'est celle qui semble venir à l'esprit +de la plupart des gens. Il s'agit d'un critère beaucoup plus faible que +celui du logiciel libre, et aussi beaucoup plus faible que la définition +officielle de l'open source. Il inclut beaucoup de programmes qui ne sont ni +libres, ni open source.</p> + +<p>La signification évidente d'« open source » n'étant pas celle qu'entendent +ses défenseurs, la plupart des gens comprennent mal cette expression. Selon +Neal Stephenson, « “Linux est un logiciel open source” signifie simplement +que n'importe qui peut obtenir des copies de son code source ». Je ne pense +pas qu'il ait délibérément cherché à rejeter ou à remettre en cause la +définition officielle. Je pense plutôt qu'il s'est simplement basé sur les +conventions de la langue anglaise pour trouver un sens à cette +expression. <a +href="https://web.archive.org/web/20001011193422/http://da.state.ks.us/ITEC/TechArchPt6ver80.pdf"> +L'état du Kansas</a> a publié une définition similaire : « Utiliser des +logiciels open source (OSS). Les logiciels open source sont des logiciels +pour lesquels le code est librement et publiquement disponible, bien que les +accords de licence spécifiques varient sur ce que l'on peut faire avec ce +code. »</p> + +<p>Le <cite>New York Times</cite> <a +href="http://www.nytimes.com/external/gigaom/2009/02/07/07gigaom-the-brave-new-world-of-open-source-game-design-37415.html">a +fait paraître un article qui élargit le sens de cette expression</a> jusqu'à +l'appliquer aux bêta tests (laisser quelques utilisateurs essayer une +pré-version et donner un retour confidentiel), ce que les développeurs de +logiciels privateurs pratiquent depuis des décennies.</p> + +<p>La signification d'« open source » a été élargie au point d'englober les +plans d'équipements qui sont <a +href="http://www.theguardian.com/sustainable-business/2015/aug/27/texas-teenager-water-purifier-toxic-e-waste-pollution">publiés +sans brevet</a>. Les plans d'équipements libres de brevets peuvent être des +contributions louables à la société, mais l'expression « code source » ne +peut pas leur être appliquée.</p> + +<p>Les partisans de l'open source essaient de traiter le problème en rappelant +leur définition officielle, mais cette approche corrective est moins +efficace pour eux qu'elle ne l'est pour nous. <cite>Free software</cite> a +deux significations naturelles, l'une d'entre elle étant la signification +escomptée ; ainsi une personne qui aura saisi l'idée de <cite>free speech, +not free beer</cite> ne pourra plus dès lors se tromper sur son sens. Mais +le terme « open source » n'a qu'une seule signification naturelle, qui est +différente de la signification voulue par ses partisans. Aussi n'y a-t-il +aucune manière succincte d'expliquer et de justifier sa définition +officielle. Cela ne fait qu'augmenter la confusion.</p> + +<p>Autre malentendu de l'open source : l'idée que cela signifie « ne pas +utiliser la GNU GPL » ; cette idée va souvent de pair avec la confusion +entre « logiciel libre » et « logiciel sous GPL ». Ce sont deux erreurs, +puisque la GNU GPL répond aux critères de l'open source et que la plupart +des licences open source répondent aux critères du logiciel libre. Il y a <a +href="/licenses/license-list.html"> de nombreuses licences de logiciel +libre</a>, à part la GNU GPL.</p> + +<p>Le sens de l'expression « open source » a été élargi par son application à +d'autres activités, entre autres l'administration publique, l'éducation et +la science, où la notion de code source n'a aucun sens et où les critères +des licences de logiciel ne sont tout simplement pas pertinents. La seule +chose que ces activités ont en commun est que, chacune à sa manière, elles +invitent le public à participer. Tant et si bien qu'« open source » ne +signifie plus que « participatif », « transparent » ou moins encore. À la +limite, c'est devenu <a +href="http://www.nytimes.com/2013/03/17/opinion/sunday/morozov-open-and-closed.html"> +une expression à la mode vide de sens</a>.</p> + +<h3>Des valeurs différentes peuvent amener à des conclusions similaires – mais +pas toujours</h3> + +<p>Les groupes radicaux des années 60 avaient une réputation de sectarisme : +certaines organisations se sont scindées en deux en raison de désaccords sur +des détails de stratégie et les deux groupes résultants se sont traités l'un +l'autre en ennemis en dépit du fait qu'ils avaient les mêmes buts et se +basaient sur des valeurs semblables. La droite a fait grand cas de ceci et +s'en est servi pour critiquer la gauche toute entière.</p> + +<p>Certains essaient de dénigrer le mouvement du logiciel libre en comparant +notre désaccord avec l'open source aux désaccords de ces groupes +radicaux. Ces personnes ont tout faux. Nous sommes en désaccord avec le camp +de l'open source sur les buts et les valeurs de base, mais en pratique leurs +points de vue et les nôtres mènent dans beaucoup de cas au même +comportement, comme de développer du logiciel libre.</p> + +<p>Par conséquent, les gens du mouvement du logiciel libre et du camp de l'open +source travaillent souvent ensemble sur des projets concrets comme le +développement logiciel. Il est remarquable que des points de vue +philosophiques tellement divergents puissent si souvent motiver des +personnes différentes à participer aux mêmes projets. Néanmoins, il y a des +situations où ces vues fondamentalement différentes mènent à des actions +très différentes.</p> + +<p>L'open source repose sur l'idée qu'en permettant aux utilisateurs de +modifier et redistribuer le logiciel, celui-ci en sortira plus puissant et +plus fiable. Mais cela n'est pas garanti. Les développeurs de logiciels +privateurs ne sont pas forcément incompétents. Parfois ils produisent un +programme qui est puissant et fiable, bien qu'il ne respecte pas les +libertés des utilisateurs. Les activistes du logiciel libre et les +enthousiastes de l'open source vont réagir très différemment à cette +situation.</p> + +<p>Un pur enthousiaste de l'open source, absolument pas influencé par les +idéaux du logiciel libre, dira : « Je suis surpris que vous ayez été capable +de faire fonctionner ce programme si bien sans utiliser notre modèle de +développement, mais vous l'avez fait. Comment puis-je m'en procurer un +exemplaire ? » Ce genre d'attitude incite à des arrangements qui emportent +avec eux notre liberté, la menant à sa perte.</p> + +<p>L'activiste du logiciel libre dira : « Votre programme est vraiment +attrayant, mais pas au prix de ma liberté. Donc je n'en veux pas. Je vais +faire mon travail autrement et soutenir un projet ayant pour but de +développer une alternative libre. » Si nous accordons de la valeur à notre +liberté, nous pouvons agir pour la conserver et la défendre.</p> + +<h3>Un logiciel puissant et fiable peut être mauvais</h3> + +<p>Le souhait que le logiciel soit puissant et fiable provient de l'idée que le +logiciel est fait pour servir ses utilisateurs. S'il est puissant et fiable, +il les sert mieux.</p> + +<p>Mais pour qu'on puisse dire d'un logiciel qu'il sert ses utilisateurs, il +doit respecter leur liberté. Que dire s'il est conçu pour les enchaîner ? Sa +puissance signifie alors uniquement que les chaînes sont plus serrées. Les +fonctionnalités malveillantes telles que l'espionnage des utilisateurs, les +restrictions, les portes dérobées et les mises à jour forcées sont pratique +courante dans les logiciels privateurs et certains partisans de l'open +source veulent les introduire dans les programmes open source.</p> + +<p>Sous la pression des maisons de disques et des producteurs de films, les +logiciels destinés au grand public sont de plus en plus conçus +spécifiquement pour lui imposer des restrictions. Cette fonctionnalité +malveillante est connue sous le nom de gestion numérique des restrictions, +ou <abbr title="Digital Restrictions Management">DRM</abbr> (voir <a +href="http://defectivebydesign.org/">DefectiveByDesign.org</a>). Dans son +esprit, c'est l'antithèse de la liberté que le logiciel libre vise à +procurer. Et pas simplement dans l'esprit : étant donné que le but des +dispositifs de DRM est de piétiner votre liberté, leurs concepteurs essayent +de vous rendre difficile, impossible ou même illégal de modifier le logiciel +qui met en application ces dispositifs.</p> + +<p>Pourtant quelques défenseurs de l'open source ont proposé des « DRM open +source ». Ils partent de l'idée qu'en publiant le code source de leur +programme conçu pour restreindre votre accès aux médias chiffrés et en +autorisant d'autres personnes à le modifier, ils produiront un logiciel plus +puissant et plus fiable pour imposer des restrictions aux utilisateurs comme +vous. Il vous sera alors livré dans des appareils qui ne vous permettront +pas de le changer.</p> + +<p>Il se peut que ce logiciel soit open source et utilise le modèle de +développement open source ; mais ce ne sera pas un logiciel libre, puisqu'il +ne respectera pas la liberté des utilisateurs qui le font effectivement +fonctionner. Si le modèle de développement open source réussit à rendre ce +logiciel plus puissant et plus fiable pour limiter vos droits, cela le +rendra encore pire.</p> + +<h3>La crainte de la liberté</h3> + +<p>À l'origine, la principale motivation de ceux qui ont détaché le camp de +l'open source du mouvement du logiciel libre était que les idées éthiques du +« logiciel libre » mettaient certaines personnes mal à l'aise. C'est vrai : +soulever des questions éthiques comme la liberté, parler de responsabilités +aussi bien que de commodité, c'est demander aux gens de penser à des choses +qu'ils préféreraient ignorer, comme de savoir si leur conduite est éthique +ou non. Cela peut déclencher un malaise et certains peuvent simplement +fermer leur esprit à ces questions. Il ne s'ensuit pas que nous devrions +cesser d'en parler.</p> + +<p>C'est pourtant ce que les leaders de l'open source ont décidé de faire. Ils +ont supputé qu'en passant sous silence l'éthique et la liberté et en ne +parlant que des avantages pratiques immédiats de certains logiciels libres, +ils seraient à même de « vendre » le logiciel plus efficacement à certains +utilisateurs, particulièrement aux entreprises.</p> + +<p>Quand les partisans de l'open source parlent de quelque chose de plus +fondamental, ils évoquent habituellement l'idée de « faire cadeau » du code +source à l'humanité. Présenter cela comme une bonne action exceptionnelle, +allant au-delà de ce qu'exige la morale, laisse supposer que la distribution +de logiciel privateur sans le code source est moralement légitime.</p> + +<p>Cette approche a prouvé son efficacité, à sa manière. La rhétorique de +l'open source a convaincu beaucoup d'entreprises et de particuliers +d'utiliser et même de développer du logiciel libre, ce qui a élargi notre +communauté, mais seulement à un niveau pratique superficiel. La philosophie +de l'open source, avec ses valeurs purement utilitaires, empêche la +compréhension des idées plus fondamentales du logiciel libre ; elle amène +beaucoup de monde dans notre communauté, mais ne leur apprend pas à la +défendre. En soi, ce n'est pas mal, mais ce n'est pas assez pour instaurer +une liberté durable. Attirer des utilisateurs vers le logiciel libre ne leur +fait faire qu'une partie du chemin vers la défense de leur propre liberté.</p> + +<p>Tôt ou tard, ces utilisateurs seront invités à retourner vers le logiciel +privateur pour quelques avantages pratiques. D'innombrables sociétés +cherchent à les tenter de cette manière, certaines proposent même des +exemplaires gratuits. Pourquoi les utilisateurs refuseraient-ils ? Ils le +feront seulement s'ils ont appris à donner de la valeur à la liberté que +leur procure le logiciel libre, à la liberté en tant que telle, plutôt qu'à +la commodité technique et pratique de logiciels libres particuliers. Pour +diffuser cette idée, nous devons parler de logiciel libre. Une certaine dose +de l'approche « profil bas » avec les entreprises peut être utile pour la +communauté, mais elle est dangereuse si elle devient si commune que l'amour +de la liberté finit par ressembler à une excentricité.</p> + +<p>Cette situation dangereuse est exactement celle qui prévaut actuellement. La +plupart des gens impliqués dans le logiciel libre en disent peu sur la +liberté, en particulier les distributeurs, généralement parce qu'ils +cherchent à « se faire mieux accepter en entreprise ». Presque toutes les +distributions du système d'exploitation GNU/Linux ajoutent des paquets +privateurs au système de base libre et ils invitent les utilisateurs à +considérer cela comme un avantage, plutôt qu'un défaut.</p> + +<p>Les greffons logiciels privateurs et les distributions GNU/Linux +partiellement non libres trouvent un terreau fertile parce que la majeure +partie de notre communauté n'exige pas la liberté de ses logiciels. Ce n'est +pas une coïncidence. La plupart des utilisateurs de GNU/Linux ont été +introduits au système par un discours open source qui ne leur a pas dit que +son objectif était la liberté. Les pratiques qui ne défendent pas la liberté +et les discours qui ne parlent pas de liberté vont de pair, l'un favorisant +l'autre. Pour surmonter cette tendance, nous avons besoin de parler +davantage de liberté et non l'inverse.</p> + +<h3>« FLOSS » et « FOSS »</h3> + +<p> On utilise les termes « FLOSS » et « FOSS » pour rester <a +href="/philosophy/floss-and-foss.html">neutre vis-à-vis du logiciel libre et +de l'open source</a>. Si la neutralité est ce que vous recherchez, « FLOSS » +est le meilleur des deux parce qu'il est vraiment neutre. Mais si votre but +est de défendre la liberté, ce n'est pas en utilisant des termes neutres que +vous l'atteindrez. Pour défendre la liberté, vous devez montrer aux gens que +vous la soutenez.</p> + +<h3>Rivaux en termes de popularité</h3> + +<p>« Libre » et « open » sont rivaux en termes de popularité. « Logiciel +libre » et « open source » sont des notions différentes mais, dans la vision +du logiciel qu'ont la plupart des gens, elles se font concurrence sur le +même créneau conceptuel. L'habitude de dire et penser « open source » fait +obstacle à la compréhension de la philosophie du mouvement du logiciel libre +et empêche d'y réfléchir. Si une personne en est arrivée au point de nous +associer, nous et notre logiciel, au terme « open », elle a peut-être besoin +d'être choquée intellectuellement pour admette que nous militons pour +<em>autre chose</em>. Toute action qui fait la promotion des termes « open » +ou « ouvert » a tendance à tirer un peu plus le rideau qui cache les idées +du mouvement du logiciel libre.</p> + +<p>Par conséquent, les activistes du logiciel libre seront bien avisés de ne +pas prendre part aux actions qui se présentent comme « open » ou +« ouvertes ». Même si l'action dont il s'agit est bonne en soi, chacune de +vos contributions fait un peu de mal par ailleurs en promouvant l'idée +d'open source. Il y a une multitude d'autres actions bénéfiques qui se +présentent comme « libres ». Toute contribution à ces projets a un petit +plus par ailleurs. Avec un choix pareil de projets utiles, pourquoi ne pas +choisir celui qui fait le plus de bien ?</p> + +<h3>Conclusion</h3> + +<p>À un moment où ceux qui prônent l'open source amènent de nouveaux +utilisateurs dans notre communauté, nous, activistes du logiciel libre, +devons assumer la tâche d'attirer l'attention de ces nouveaux utilisateurs +sur la question de la liberté. Nous devons leur dire « C'est du logiciel +libre et il te donne la liberté ! » plus souvent et plus fort que +jamais. Chaque fois que vous dites « logiciel libre » plutôt qu'« open +source » vous soutenez notre cause.</p> + +</div> + +<h4>Note</h4> + +<!-- The article is incomplete (#793776) as of 21st January 2013. +<p> + +Joe Barr's article, +<a href="http://www.itworld.com/LWD010523vcontrol4">“Live and +let license,”</a> gives his perspective on this issue.</p> +--> +<p> +L'article de Lakhani et Wolf sur <a +href="http://ocw.mit.edu/courses/sloan-school-of-management/15-352-managing-innovation-emerging-trends-spring-2005/readings/lakhaniwolf.pdf">la +motivation des développeurs de logiciel libre</a> dit qu'une fraction +considérable d'entre eux est motivée par la notion que le logiciel doit être +libre. Ceci bien que l'enquête ait été faite parmi les développeurs de +SourceForge, un site qui ne soutient pas le point de vue selon lequel il +s'agit d'une question d'éthique.</p> + +<div class="translators-notes"> + +<!--TRANSLATORS: Use space (SPC) as msgstr if you don't have notes.--> +<hr /><b>Notes de traduction</b> <ol> +<li><a id="TransNote1" href="#TransNote1-rev" +class="nounderline">↑</a> +Le mot anglais <cite>free</cite> a deux significations, « libre » (exemple : +<cite>free speech</cite>, libre expression) et « gratuit » (exemple : +<cite>free beer</cite>, bière gratuite). Il y a peu de chance qu'on fasse la +confusion en français, car « entrée libre » est à peu près le seul cas où +l'on peut donner à « libre » le sens de « gratuit » ; on constate malgré +tout que le logiciel libre est souvent assimilé (par erreur) à du logiciel +gratuit.</li> + +<li><a id="TransNote2" href="#TransNote2-rev" +class="nounderline">↑</a> +<cite>Open source</cite> : à code source ouvert.</li> + +<li><a id="TransNote3" href="#TransNote3-rev" +class="nounderline">↑</a> +Autre traduction de <cite>proprietary</cite> : propriétaire.</li> +</ol></div> +</div> + +<!-- for id="content", starts in the include above --> +<!--#include virtual="/server/footer.fr.html" --> +<div id="footer"> +<div class="unprintable"> + +<p>Veuillez envoyer les requêtes concernant la FSF et GNU à <a +href="mailto:gnu@gnu.org"><gnu@gnu.org></a>. Il existe aussi <a +href="/contact/">d'autres moyens de contacter</a> la FSF. Les liens +orphelins et autres corrections ou suggestions peuvent être signalés à <a +href="mailto:webmasters@gnu.org"><webmasters@gnu.org></a>.</p> + +<p> + +<!-- TRANSLATORS: Ignore the original text in this paragraph, + replace it with the translation of these two: + + We work hard and do our best to provide accurate, good quality + translations. However, we are not exempt from imperfection. + Please send your comments and general suggestions in this regard + to <a href="mailto:web-translators@gnu.org"> + + <web-translators@gnu.org></a>.</p> + + <p>For information on coordinating and submitting translations of + our web pages, see <a + href="/server/standards/README.translations.html">Translations + README</a>. --> +Nous faisons le maximum pour proposer des traductions fidèles et de bonne +qualité, mais nous ne sommes pas parfaits. Merci d'adresser vos commentaires +sur cette page, ainsi que vos suggestions d'ordre général sur les +traductions, à <a href="mailto:web-translators@gnu.org"> +<web-translators@gnu.org></a>.</p> +<p>Pour tout renseignement sur la coordination et la soumission des +traductions de nos pages web, reportez-vous au <a +href="/server/standards/README.translations.html">guide de traduction</a>.</p> +</div> + +<p>Copyright © 2007, 2010, 2012, 2015, 2016, 2019, 2020 Richard Stallman</p> + +<p>Cette page peut être utilisée suivant les conditions de la licence <a +rel="license" +href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/deed.fr">Creative +Commons attribution, pas de modification, 4.0 internationale (CC BY-ND +4.0)</a>.</p> + +<!--#include virtual="/server/bottom-notes.fr.html" --> +<div class="translators-credits"> + +<!--TRANSLATORS: Use space (SPC) as msgstr if you don't want credits.--> +Traduction : Mathieu Stumpf.<br />Révision : <a +href="mailto:trad-gnu@april.org">trad-gnu@april.org</a></div> + +<p class="unprintable"><!-- timestamp start --> +Dernière mise à jour : + +$Date: 2020/10/06 08:42:12 $ + +<!-- timestamp end --> +</p> +</div> +</div> +</body> +</html> |