From 1ae0306a3cf2ea27f60b2d205789994d260c2cce Mon Sep 17 00:00:00 2001 From: Christian Grothoff Date: Sun, 11 Oct 2020 13:29:45 +0200 Subject: add i18n FSFS --- .../articles/fr/open-source-misses-the-point.html | 571 +++++++++++++++++++++ 1 file changed, 571 insertions(+) create mode 100644 talermerchantdemos/blog/articles/fr/open-source-misses-the-point.html (limited to 'talermerchantdemos/blog/articles/fr/open-source-misses-the-point.html') diff --git a/talermerchantdemos/blog/articles/fr/open-source-misses-the-point.html b/talermerchantdemos/blog/articles/fr/open-source-misses-the-point.html new file mode 100644 index 0000000..4e49aca --- /dev/null +++ b/talermerchantdemos/blog/articles/fr/open-source-misses-the-point.html @@ -0,0 +1,571 @@ + + + + + + +En quoi l'open source perd de vue l'éthique du logiciel libre - Projet GNU - +Free Software Foundation + + + +

En quoi l'open source perd de vue l'éthique du logiciel libre

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par Richard Stallman
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+Les termes « logiciel libre » et « open source » recouvrent à peu près la +même gamme de logiciels. Cependant, ils disent des choses profondément +différentes sur ces logiciels, car ils se basent sur des valeurs +différentes. Le mouvement du logiciel libre fait campagne pour la liberté +des utilisateurs de l'informatique ; c'est un mouvement qui lutte pour la +liberté et la justice. L'idéologie open source, par contre, met surtout +l'accent sur les avantages pratiques et ne fait pas campagne pour des +principes. C'est pourquoi nous ne sommes pas d'accord avec l'open source et +n'utilisons pas ce terme. +

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Quand on dit qu'un logiciel est « libre » [free], on entend par +là qu'il respecte les libertés +essentielles de l'utilisateur : la liberté de l'utiliser, de l'étudier, +de le modifier et d'en redistribuer des copies, modifiées ou non. C'est une +question de liberté, pas de prix – pensez à « liberté d'expression » et pas +à « entrée libre » [think of “free speech”, not “free beer”].1

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Ces libertés sont d'une importance vitale. Elles sont essentielles, pas +uniquement pour les enjeux individuels des utilisateurs, mais parce qu'elles +favorisent le partage et la coopération qui fondent la solidarité +sociale. Elles prennent encore plus d'importance alors que notre culture et +nos activités quotidiennes se numérisent. Dans un monde de sons, d'images et +de mots numériques, le logiciel libre devient de plus en plus nécessaire +pour la liberté en général.

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Des dizaines de millions de personnes de par le monde utilisent maintenant +le logiciel libre ; les écoles publiques de quelques régions d'Inde et +d'Espagne enseignent à tous les élèves l'utilisation du système d'exploitation libre +GNU/Linux. Mais la plupart des utilisateurs n'ont jamais entendu parler +des raisons éthiques pour lesquelles nous avons développé ce système et bâti +la communauté du logiciel libre, parce qu'aujourd'hui ce système et la +communauté sont le plus souvent décrits comme « open source »2 et attribués à une +philosophie différente dans laquelle ces libertés sont à peine mentionnées.

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Le mouvement du logiciel libre fait campagne pour la liberté des +utilisateurs de l'informatique depuis 1983. En 1984 nous avons lancé le +développement du système d'exploitation libre GNU, afin de pouvoir éviter +les systèmes d'exploitation non libres qui refusent la liberté à leurs +utilisateurs. Durant les années 80, nous avons développé la majeure partie +des composants essentiels de ce système et conçu la licence publique générale GNU (GNU GPL), une licence destinée +spécifiquement à protéger la liberté de tous les utilisateurs d'un +programme.

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Cependant, tous les utilisateurs et développeurs de logiciel libre n'étaient +pas en accord avec les buts du mouvement du logiciel libre. En 1998, une +partie de la communauté du libre a formé un groupe dissident et commencé à +faire campagne au nom de l'« open source ». Cette dénomination fut proposée +à l'origine pour éviter une possible incompréhension de free +software, mais on l'associa bientôt à des points de vue +philosophiques complètement différents de ceux du mouvement du logiciel +libre.

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Certains des partisans de l'open source considéraient cela comme « une +campagne marketing pour le logiciel libre » qui séduirait les cadres des +entreprises en mettant en relief ses avantages pratiques, tout en évitant +les idées de bien et de mal que ces cadres pouvaient ne pas +apprécier. D'autres partisans rejetaient catégoriquement les valeurs morales +et sociétales du mouvement du logiciel libre. Quel que fût leur point de +vue, ils n'ont ni mentionné ni préconisé ces valeurs pendant leur campagne +pour l'open source. On associa rapidement « open source » à des idées et des +arguments basés sur des valeurs utilitaires comme la fabrication ou la +possession de logiciels puissants et fiables. La plupart des défenseurs de +l'open source se sont depuis ralliés à ces idées et ils continuent à faire +cette association. La plupart des discussions sur l'open source ne +s'intéressent pas au bien et au mal, seulement à la popularité et au +succès. En voici +un exemple typique. Il est vrai qu'une minorité de partisans de l'open +source disent maintenant que la liberté est en jeu, mais ils ne sont pas +très visibles parmi ceux qui disent le contraire.

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Les deux expressions décrivent à peu près la même catégorie de logiciel, +mais elles représentent des points de vue basés sur des valeurs +fondamentalement différentes. L'open source est une méthodologie de +développement ; le logiciel libre est un mouvement de société. Pour le +mouvement du logiciel libre, ce dernier représente un impératif éthique, +l'indispensable respect de la liberté de l'utilisateur. La philosophie de +l'open source, pour sa part, envisage uniquement les enjeux pratiques, en +termes de performance. Elle dit que le logiciel non libre est une solution +sous-optimale au problème pratique à résoudre.

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Pour le mouvement du logiciel libre, au contraire, le logiciel non libre est +un problème sociétal, et la solution consiste à cesser de l'utiliser et à +migrer vers le logiciel libre.

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« Logiciel libre ». « Open source ». Si ce sont les mêmes logiciels (ou presque), le nom utilisé +pour les qualifier est-il important ? Oui, parce que des mots différents +véhiculent des idées différentes. Bien qu'un programme libre, si on +l'appelle autrement, vous donne la même liberté aujourd'hui, établir la +liberté de manière durable exige comme condition première d'enseigner la +valeur de la liberté. Si vous voulez y contribuer, il est essentiel de +parler de « logiciel libre ».

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Nous qui militons au mouvement du logiciel libre, nous ne considérons pas le +camp de l'open source comme un ennemi ; l'ennemi est le logiciel +privateur.3 Mais +nous voulons faire savoir aux gens que nous défendons la liberté, c'est +pourquoi nous n'acceptons pas d'être incorrectement assimilés aux partisans +de l'open source. Ce que nous défendons n'est pas le code source « ouvert » +[open source], et ce que à quoi nous nous opposons n'est pas le +code source « fermé » [closed source]. Pour éviter les +malentendus, nous évitons ces deux termes. +

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Différences pratiques entre logiciel libre et open source

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En pratique, l'open source défend des critères un peu moins stricts que ceux +du logiciel libre. À notre connaissance, le code source de tous les +logiciels libres publiés existants répond aux critères de l'open +source. Presque tous les logiciels open source sont des logiciels libres, +mais il y a des exceptions. D'abord, certaines licences open source sont +trop restrictives, donc se disqualifient en tant que licences libres. Par +exemple, « Open Watcom » est non libre parce que sa licence ne permet pas +d'en faire une version modifiée et de l'utiliser en privé. Heureusement, les +programmes utilisant ces licences sont rares.

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De plus, lorsque le code source d'un programme a une licence faible, sans +copyleft, des conditions supplémentaires non libres peuvent être ajoutées à +la licence de ses exécutables. C'est ce que fait Microsoft avec Visual Studio, par +exemple.

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Si ces exécutables correspondent exactement aux sources publiées, ils +répondent aux critères de l'open source, mais pas à ceux du logiciel +libre. Cependant, les utilisateurs peuvent dans ce cas recompiler les +sources en exécutables libres et distribuer ces derniers.

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Enfin, le plus important en pratique est que beaucoup de produits +manufacturés embarquant des ordinateurs vérifient les signatures de leurs +programmes exécutables de manière à empêcher les utilisateurs d'installer +des exécutables différents ; seule une entreprise agréée peut faire des +exécutables pouvant fonctionner dans l'appareil ou accéder à l'ensemble de +ses capacités. Nous donnons à ces appareils le nom de « tyrans », et la +pratique en question s'appelle « tivoïsation » d'après le produit (Tivo) +dans lequel nous l'avons observée pour la première fois. Même si +l'exécutable provient d'un code source libre, les utilisateurs ne peuvent +pas en faire fonctionner de version modifiée ; l'exécutable n'est donc pas +libre, de fait.

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De nombreux produits sous Android contiennent des exécutables de Linux +tivoïsés, bien que la licence de leur code source soit la GNU GPL +(version 2). Nous avons fait en sorte d'interdire cette pratique dans la +version 3.

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Les critères de l'open source s'intéressent uniquement à la licence du code +source. Par conséquent ces exécutables non libres, quand ils sont obtenus à +partir d'un code source comme Linux, qui est open source et libre, sont open +source mais non libres.

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Malentendus courants sur le « logiciel libre » et l'« open source »

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L'expression free software souffre d'un problème de mauvaise +interprétation : une signification fortuite, « un logiciel que vous pouvez +avoir gratuitement », lui correspond aussi bien que la signification voulue, +« un logiciel qui donne certaines libertés à l'utilisateur ». Nous traitons +ce problème en publiant la définition du logiciel libre et en disant : +think of “free speech”, not “free beer”. Ce n'est pas une +solution parfaite, cela ne peut pas complètement éliminer le problème. Une +expression correcte non ambiguë serait meilleure si elle n'avait pas +d'autres problèmes.

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Malheureusement, toutes les dénominations alternatives en anglais ont leurs +problèmes. Nous avons étudié un grand nombre de suggestions, mais aucune ne +s'impose assez clairement pour qu'il soit souhaitable de l'adopter (par +exemple, le mot français ou espagnol « libre » peut être utilisé dans +certains contextes, mais en Inde les gens ne le reconnaissent pas du +tout). Toutes les expressions suggérées pour remplacer free +software ont des problèmes sémantiques, y compris open source +software.

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La définition officielle du « logiciel +open source » (publiée par l'Open Source Initiative et trop +longue pour être citée ici) dérive indirectement de nos critères pour le +logiciel libre. Elle est différente, car un peu plus laxiste à certains +égards. Néanmoins, cette définition est en accord avec la nôtre dans la +plupart des cas.

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Cependant, la signification évidente de « logiciel open source » est « vous +pouvez regarder le code source » et c'est celle qui semble venir à l'esprit +de la plupart des gens. Il s'agit d'un critère beaucoup plus faible que +celui du logiciel libre, et aussi beaucoup plus faible que la définition +officielle de l'open source. Il inclut beaucoup de programmes qui ne sont ni +libres, ni open source.

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La signification évidente d'« open source » n'étant pas celle qu'entendent +ses défenseurs, la plupart des gens comprennent mal cette expression. Selon +Neal Stephenson, « “Linux est un logiciel open source” signifie simplement +que n'importe qui peut obtenir des copies de son code source ». Je ne pense +pas qu'il ait délibérément cherché à rejeter ou à remettre en cause la +définition officielle. Je pense plutôt qu'il s'est simplement basé sur les +conventions de la langue anglaise pour trouver un sens à cette +expression. +L'état du Kansas a publié une définition similaire : « Utiliser des +logiciels open source (OSS). Les logiciels open source sont des logiciels +pour lesquels le code est librement et publiquement disponible, bien que les +accords de licence spécifiques varient sur ce que l'on peut faire avec ce +code. »

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Le New York Times a +fait paraître un article qui élargit le sens de cette expression jusqu'à +l'appliquer aux bêta tests (laisser quelques utilisateurs essayer une +pré-version et donner un retour confidentiel), ce que les développeurs de +logiciels privateurs pratiquent depuis des décennies.

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La signification d'« open source » a été élargie au point d'englober les +plans d'équipements qui sont publiés +sans brevet. Les plans d'équipements libres de brevets peuvent être des +contributions louables à la société, mais l'expression « code source » ne +peut pas leur être appliquée.

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Les partisans de l'open source essaient de traiter le problème en rappelant +leur définition officielle, mais cette approche corrective est moins +efficace pour eux qu'elle ne l'est pour nous. Free software a +deux significations naturelles, l'une d'entre elle étant la signification +escomptée ; ainsi une personne qui aura saisi l'idée de free speech, +not free beer ne pourra plus dès lors se tromper sur son sens. Mais +le terme « open source » n'a qu'une seule signification naturelle, qui est +différente de la signification voulue par ses partisans. Aussi n'y a-t-il +aucune manière succincte d'expliquer et de justifier sa définition +officielle. Cela ne fait qu'augmenter la confusion.

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Autre malentendu de l'open source : l'idée que cela signifie « ne pas +utiliser la GNU GPL » ; cette idée va souvent de pair avec la confusion +entre « logiciel libre » et « logiciel sous GPL ». Ce sont deux erreurs, +puisque la GNU GPL répond aux critères de l'open source et que la plupart +des licences open source répondent aux critères du logiciel libre. Il y a de nombreuses licences de logiciel +libre, à part la GNU GPL.

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Le sens de l'expression « open source » a été élargi par son application à +d'autres activités, entre autres l'administration publique, l'éducation et +la science, où la notion de code source n'a aucun sens et où les critères +des licences de logiciel ne sont tout simplement pas pertinents. La seule +chose que ces activités ont en commun est que, chacune à sa manière, elles +invitent le public à participer. Tant et si bien qu'« open source » ne +signifie plus que « participatif », « transparent » ou moins encore. À la +limite, c'est devenu +une expression à la mode vide de sens.

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Des valeurs différentes peuvent amener à des conclusions similaires – mais +pas toujours

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Les groupes radicaux des années 60 avaient une réputation de sectarisme : +certaines organisations se sont scindées en deux en raison de désaccords sur +des détails de stratégie et les deux groupes résultants se sont traités l'un +l'autre en ennemis en dépit du fait qu'ils avaient les mêmes buts et se +basaient sur des valeurs semblables. La droite a fait grand cas de ceci et +s'en est servi pour critiquer la gauche toute entière.

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Certains essaient de dénigrer le mouvement du logiciel libre en comparant +notre désaccord avec l'open source aux désaccords de ces groupes +radicaux. Ces personnes ont tout faux. Nous sommes en désaccord avec le camp +de l'open source sur les buts et les valeurs de base, mais en pratique leurs +points de vue et les nôtres mènent dans beaucoup de cas au même +comportement, comme de développer du logiciel libre.

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Par conséquent, les gens du mouvement du logiciel libre et du camp de l'open +source travaillent souvent ensemble sur des projets concrets comme le +développement logiciel. Il est remarquable que des points de vue +philosophiques tellement divergents puissent si souvent motiver des +personnes différentes à participer aux mêmes projets. Néanmoins, il y a des +situations où ces vues fondamentalement différentes mènent à des actions +très différentes.

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L'open source repose sur l'idée qu'en permettant aux utilisateurs de +modifier et redistribuer le logiciel, celui-ci en sortira plus puissant et +plus fiable. Mais cela n'est pas garanti. Les développeurs de logiciels +privateurs ne sont pas forcément incompétents. Parfois ils produisent un +programme qui est puissant et fiable, bien qu'il ne respecte pas les +libertés des utilisateurs. Les activistes du logiciel libre et les +enthousiastes de l'open source vont réagir très différemment à cette +situation.

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Un pur enthousiaste de l'open source, absolument pas influencé par les +idéaux du logiciel libre, dira : « Je suis surpris que vous ayez été capable +de faire fonctionner ce programme si bien sans utiliser notre modèle de +développement, mais vous l'avez fait. Comment puis-je m'en procurer un +exemplaire ? » Ce genre d'attitude incite à des arrangements qui emportent +avec eux notre liberté, la menant à sa perte.

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L'activiste du logiciel libre dira : « Votre programme est vraiment +attrayant, mais pas au prix de ma liberté. Donc je n'en veux pas. Je vais +faire mon travail autrement et soutenir un projet ayant pour but de +développer une alternative libre. » Si nous accordons de la valeur à notre +liberté, nous pouvons agir pour la conserver et la défendre.

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Un logiciel puissant et fiable peut être mauvais

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Le souhait que le logiciel soit puissant et fiable provient de l'idée que le +logiciel est fait pour servir ses utilisateurs. S'il est puissant et fiable, +il les sert mieux.

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Mais pour qu'on puisse dire d'un logiciel qu'il sert ses utilisateurs, il +doit respecter leur liberté. Que dire s'il est conçu pour les enchaîner ? Sa +puissance signifie alors uniquement que les chaînes sont plus serrées. Les +fonctionnalités malveillantes telles que l'espionnage des utilisateurs, les +restrictions, les portes dérobées et les mises à jour forcées sont pratique +courante dans les logiciels privateurs et certains partisans de l'open +source veulent les introduire dans les programmes open source.

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Sous la pression des maisons de disques et des producteurs de films, les +logiciels destinés au grand public sont de plus en plus conçus +spécifiquement pour lui imposer des restrictions. Cette fonctionnalité +malveillante est connue sous le nom de gestion numérique des restrictions, +ou DRM (voir DefectiveByDesign.org). Dans son +esprit, c'est l'antithèse de la liberté que le logiciel libre vise à +procurer. Et pas simplement dans l'esprit : étant donné que le but des +dispositifs de DRM est de piétiner votre liberté, leurs concepteurs essayent +de vous rendre difficile, impossible ou même illégal de modifier le logiciel +qui met en application ces dispositifs.

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Pourtant quelques défenseurs de l'open source ont proposé des « DRM open +source ». Ils partent de l'idée qu'en publiant le code source de leur +programme conçu pour restreindre votre accès aux médias chiffrés et en +autorisant d'autres personnes à le modifier, ils produiront un logiciel plus +puissant et plus fiable pour imposer des restrictions aux utilisateurs comme +vous. Il vous sera alors livré dans des appareils qui ne vous permettront +pas de le changer.

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Il se peut que ce logiciel soit open source et utilise le modèle de +développement open source ; mais ce ne sera pas un logiciel libre, puisqu'il +ne respectera pas la liberté des utilisateurs qui le font effectivement +fonctionner. Si le modèle de développement open source réussit à rendre ce +logiciel plus puissant et plus fiable pour limiter vos droits, cela le +rendra encore pire.

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La crainte de la liberté

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À l'origine, la principale motivation de ceux qui ont détaché le camp de +l'open source du mouvement du logiciel libre était que les idées éthiques du +« logiciel libre » mettaient certaines personnes mal à l'aise. C'est vrai : +soulever des questions éthiques comme la liberté, parler de responsabilités +aussi bien que de commodité, c'est demander aux gens de penser à des choses +qu'ils préféreraient ignorer, comme de savoir si leur conduite est éthique +ou non. Cela peut déclencher un malaise et certains peuvent simplement +fermer leur esprit à ces questions. Il ne s'ensuit pas que nous devrions +cesser d'en parler.

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C'est pourtant ce que les leaders de l'open source ont décidé de faire. Ils +ont supputé qu'en passant sous silence l'éthique et la liberté et en ne +parlant que des avantages pratiques immédiats de certains logiciels libres, +ils seraient à même de « vendre » le logiciel plus efficacement à certains +utilisateurs, particulièrement aux entreprises.

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Quand les partisans de l'open source parlent de quelque chose de plus +fondamental, ils évoquent habituellement l'idée de « faire cadeau » du code +source à l'humanité. Présenter cela comme une bonne action exceptionnelle, +allant au-delà de ce qu'exige la morale, laisse supposer que la distribution +de logiciel privateur sans le code source est moralement légitime.

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Cette approche a prouvé son efficacité, à sa manière. La rhétorique de +l'open source a convaincu beaucoup d'entreprises et de particuliers +d'utiliser et même de développer du logiciel libre, ce qui a élargi notre +communauté, mais seulement à un niveau pratique superficiel. La philosophie +de l'open source, avec ses valeurs purement utilitaires, empêche la +compréhension des idées plus fondamentales du logiciel libre ; elle amène +beaucoup de monde dans notre communauté, mais ne leur apprend pas à la +défendre. En soi, ce n'est pas mal, mais ce n'est pas assez pour instaurer +une liberté durable. Attirer des utilisateurs vers le logiciel libre ne leur +fait faire qu'une partie du chemin vers la défense de leur propre liberté.

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Tôt ou tard, ces utilisateurs seront invités à retourner vers le logiciel +privateur pour quelques avantages pratiques. D'innombrables sociétés +cherchent à les tenter de cette manière, certaines proposent même des +exemplaires gratuits. Pourquoi les utilisateurs refuseraient-ils ? Ils le +feront seulement s'ils ont appris à donner de la valeur à la liberté que +leur procure le logiciel libre, à la liberté en tant que telle, plutôt qu'à +la commodité technique et pratique de logiciels libres particuliers. Pour +diffuser cette idée, nous devons parler de logiciel libre. Une certaine dose +de l'approche « profil bas » avec les entreprises peut être utile pour la +communauté, mais elle est dangereuse si elle devient si commune que l'amour +de la liberté finit par ressembler à une excentricité.

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Cette situation dangereuse est exactement celle qui prévaut actuellement. La +plupart des gens impliqués dans le logiciel libre en disent peu sur la +liberté, en particulier les distributeurs, généralement parce qu'ils +cherchent à « se faire mieux accepter en entreprise ». Presque toutes les +distributions du système d'exploitation GNU/Linux ajoutent des paquets +privateurs au système de base libre et ils invitent les utilisateurs à +considérer cela comme un avantage, plutôt qu'un défaut.

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Les greffons logiciels privateurs et les distributions GNU/Linux +partiellement non libres trouvent un terreau fertile parce que la majeure +partie de notre communauté n'exige pas la liberté de ses logiciels. Ce n'est +pas une coïncidence. La plupart des utilisateurs de GNU/Linux ont été +introduits au système par un discours open source qui ne leur a pas dit que +son objectif était la liberté. Les pratiques qui ne défendent pas la liberté +et les discours qui ne parlent pas de liberté vont de pair, l'un favorisant +l'autre. Pour surmonter cette tendance, nous avons besoin de parler +davantage de liberté et non l'inverse.

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« FLOSS » et « FOSS »

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On utilise les termes « FLOSS » et « FOSS » pour rester neutre vis-à-vis du logiciel libre et +de l'open source. Si la neutralité est ce que vous recherchez, « FLOSS » +est le meilleur des deux parce qu'il est vraiment neutre. Mais si votre but +est de défendre la liberté, ce n'est pas en utilisant des termes neutres que +vous l'atteindrez. Pour défendre la liberté, vous devez montrer aux gens que +vous la soutenez.

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Rivaux en termes de popularité

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« Libre » et « open » sont rivaux en termes de popularité. « Logiciel +libre » et « open source » sont des notions différentes mais, dans la vision +du logiciel qu'ont la plupart des gens, elles se font concurrence sur le +même créneau conceptuel. L'habitude de dire et penser « open source » fait +obstacle à la compréhension de la philosophie du mouvement du logiciel libre +et empêche d'y réfléchir. Si une personne en est arrivée au point de nous +associer, nous et notre logiciel, au terme « open », elle a peut-être besoin +d'être choquée intellectuellement pour admette que nous militons pour +autre chose. Toute action qui fait la promotion des termes « open » +ou « ouvert » a tendance à tirer un peu plus le rideau qui cache les idées +du mouvement du logiciel libre.

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Par conséquent, les activistes du logiciel libre seront bien avisés de ne +pas prendre part aux actions qui se présentent comme « open » ou +« ouvertes ». Même si l'action dont il s'agit est bonne en soi, chacune de +vos contributions fait un peu de mal par ailleurs en promouvant l'idée +d'open source. Il y a une multitude d'autres actions bénéfiques qui se +présentent comme « libres ». Toute contribution à ces projets a un petit +plus par ailleurs. Avec un choix pareil de projets utiles, pourquoi ne pas +choisir celui qui fait le plus de bien ?

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Conclusion

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À un moment où ceux qui prônent l'open source amènent de nouveaux +utilisateurs dans notre communauté, nous, activistes du logiciel libre, +devons assumer la tâche d'attirer l'attention de ces nouveaux utilisateurs +sur la question de la liberté. Nous devons leur dire « C'est du logiciel +libre et il te donne la liberté ! » plus souvent et plus fort que +jamais. Chaque fois que vous dites « logiciel libre » plutôt qu'« open +source » vous soutenez notre cause.

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Note

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+L'article de Lakhani et Wolf sur la +motivation des développeurs de logiciel libre dit qu'une fraction +considérable d'entre eux est motivée par la notion que le logiciel doit être +libre. Ceci bien que l'enquête ait été faite parmi les développeurs de +SourceForge, un site qui ne soutient pas le point de vue selon lequel il +s'agit d'une question d'éthique.

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Notes de traduction
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  1.   +Le mot anglais free a deux significations, « libre » (exemple : +free speech, libre expression) et « gratuit » (exemple : +free beer, bière gratuite). Il y a peu de chance qu'on fasse la +confusion en français, car « entrée libre » est à peu près le seul cas où +l'on peut donner à « libre » le sens de « gratuit » ; on constate malgré +tout que le logiciel libre est souvent assimilé (par erreur) à du logiciel +gratuit.
  2. + +
  3.   +Open source : à code source ouvert.
  4. + +
  5.   +Autre traduction de proprietary : propriétaire.
  6. +
+ + + + + + + + -- cgit v1.2.3