taler-merchant-demos

Python-based Frontends for the Demonstration Web site
Log | Files | Refs | Submodules | README | LICENSE

misinterpreting-copyright.html (45780B)


      1 <!--#set var="ENGLISH_PAGE" value="/philosophy/misinterpreting-copyright.en.html" -->
      2 
      3 <!--#include virtual="/server/header.fr.html" -->
      4 <!-- Parent-Version: 1.96 -->
      5 <!-- This page is derived from /server/standards/boilerplate.html -->
      6 <!--#set var="TAGS" value="essays laws copyright" -->
      7 <!--#set var="DISABLE_TOP_ADDENDUM" value="yes" -->
      8 
      9 <!-- This file is automatically generated by GNUnited Nations! -->
     10 <title>Mauvaise interprétation du copyright - Projet GNU - Free Software Foundation</title>
     11 
     12 <!--#include virtual="/philosophy/po/misinterpreting-copyright.translist" -->
     13 <!--#include virtual="/server/banner.fr.html" -->
     14 <!--#include virtual="/philosophy/ph-breadcrumb.fr.html" -->
     15 <!--GNUN: OUT-OF-DATE NOTICE-->
     16 <!--#include virtual="/server/top-addendum.fr.html" -->
     17 <div class="article reduced-width">
     18 <h2>Mauvaise interprétation du copyright : une série d'erreurs</h2>
     19 
     20 <address class="byline">par <a href="https://stallman.org/">Richard Stallman</a></address>
     21 
     22 <p>
     23 Quelque chose d'étrange et de dangereux est en train d'arriver à la loi sur
     24 le copyright.<a href="#TransNote1" id="TransNote1-rev"><sup>a</sup></a> Dans
     25 la Constitution américaine, le copyright est fait pour bénéficier aux
     26 utilisateurs (ceux qui lisent des livres, écoutent de la musique, regardent
     27 des films ou utilisent des logiciels) et non pour servir les intérêts des
     28 éditeurs ou des auteurs. Cependant, alors que les gens tendent de plus en
     29 plus à rejeter et transgresser le copyright qui leur est imposé « pour leur
     30 propre bénéfice », le gouvernement ajoute des restrictions supplémentaires
     31 et essaie d'effrayer le public avec de nouvelles sanctions sévères pour
     32 qu'il rentre dans le rang.</p>
     33 <p>
     34 Comment la politique du copyright en est-elle arrivée à être diamétralement
     35 opposée à son intention déclarée ? Et comment pouvons-nous la ramener en
     36 phase avec cette intention ? Pour comprendre, nous devons commencer par
     37 examiner l'origine du droit du copyright aux États-Unis : la Constitution
     38 américaine.</p>
     39 
     40 <h3>Le copyright dans la Constitution américaine</h3>
     41 <p>
     42 Quand la Constitution américaine fut rédigée, l'idée que les auteurs
     43 seraient dotés d'un monopole sur le copyright fut proposée&hellip; et
     44 rejetée. Les fondateurs de notre nation adoptèrent un principe différent :
     45 que le copyright n'est pas un droit naturel des auteurs, mais une concession
     46 artificielle qui leur est faite dans l'intérêt du progrès. C'est le
     47 paragraphe suivant de la Constitution (article I, section 8) qui donne la
     48 permission d'établir un système de copyright :</p>
     49 <blockquote><p>
     50 [Le Congrès aura le pouvoir] de promouvoir le progrès de la science et des
     51 arts utiles en assurant pour un temps limité, aux auteurs et inventeurs, un
     52 droit exclusif sur leurs écrits et découvertes respectifs.
     53 </p></blockquote>
     54 <p>
     55 La Cour suprême a affirmé à maintes reprises que la promotion du progrès
     56 signifie que les travaux couverts par le copyright doivent bénéficier aux
     57 utilisateurs. Par exemple, dans <cite>Fox Film contre Doyal</cite>, la Cour
     58 a affirmé :</p>
     59 <blockquote><p>
     60 Le seul intérêt des États-Unis et l'objet premier de conférer le monopole
     61 [du copyright] reposent sur l'ensemble des bénéfices que tire le public du
     62 travail des auteurs.
     63 </p></blockquote>
     64 <p>
     65 Cette décision fondamentale explique pourquoi le copyright n'est pas
     66 <b>requis</b> par la Constitution, seulement <b>permis</b> en tant
     67 qu'option, et pourquoi il est censé durer un « temps limité ». Si le
     68 copyright était un droit naturel, quelque chose que les auteurs possèdent
     69 parce qu'ils y ont droit, rien ne pourrait justifier que ce droit se termine
     70 après un certain temps, pas plus que les maisons particulières ne pourraient
     71 devenir propriété publique un certain laps de temps après leur construction.</p>
     72 
     73 <h3>Le « marchandage du copyright »</h3>
     74 <p>
     75 Le système du copyright fonctionne en octroyant des privilèges, et donc des
     76 avantages, aux éditeurs et aux auteurs ; mais il ne le fait pas dans leur
     77 intérêt. Il le fait plutôt pour modifier leur comportement : pour inciter
     78 les auteurs à écrire plus et à publier plus. En fait, le gouvernement
     79 utilise les droits naturels du public, en son nom, comme contrepartie d'un
     80 marché dont le but est d'apporter au public plus d'œuvres publiées. Les
     81 érudits en droit appellent ce concept « le marchandage du copyright ». C'est
     82 comme si le gouvernement achetait une autoroute ou un avion avec l'argent du
     83 contribuable, à cette différence près que le gouvernement le fait avec notre
     84 liberté au lieu de notre argent.</p>
     85 <p>
     86 Mais ce marchandage, dans son état actuel, est-il effectivement une bonne
     87 affaire pour le public ? Beaucoup d'autres alternatives de négociation sont
     88 possibles ; laquelle est la meilleure ? Tous les problèmes inhérents à la
     89 politique du copyright résident dans cette question. Si nous interprétons
     90 mal la nature de la question, nous aurons tendance à choisir de mauvaises
     91 solutions.</p>
     92 <p>
     93 La Constitution permet d'octroyer le pouvoir du copyright aux auteurs. En
     94 pratique, les auteurs cèdent en général leurs droits aux éditeurs ;
     95 habituellement, ce sont les éditeurs, non les auteurs, qui exercent ce
     96 pouvoir et en récoltent la plupart des avantages, bien que les auteurs en
     97 obtiennent une petite part. Par conséquent, ce sont généralement les
     98 éditeurs qui font du lobbying pour augmenter le pouvoir du copyright. Pour
     99 refléter au mieux la réalité du copyright plutôt que son mythe, cet article
    100 se réfère aux éditeurs, plutôt qu'aux auteurs, comme détenteurs du
    101 copyright. Il fait aussi référence aux utilisateurs d'œuvres couvertes par
    102 un copyright comme « lecteurs », même si l'utilisation qu'ils en font n'est
    103 pas forcément une lecture, car « les utilisateurs » est un terme vague et
    104 abstrait.</p>
    105 
    106 <h3>La première erreur : « établir l'équilibre »</h3>
    107 <p>
    108 Le marchandage du copyright place le public d'abord : le bénéfice pour les
    109 lecteurs est une fin en soi ; les bénéfices (s'il y en a) pour les éditeurs
    110 sont seulement un moyen d'arriver à cette fin. Les intérêts des lecteurs et
    111 ceux des éditeurs sont ainsi qualitativement inégaux sur le plan des
    112 priorités. La première étape dans la mauvaise interprétation de l'objectif
    113 du copyright est l'élévation des éditeurs au même rang d'importance que les
    114 lecteurs.</p>
    115 <p>
    116 On dit souvent que le droit américain du copyright entend « établir
    117 l'équilibre » entre les intérêts des éditeurs et ceux des lecteurs. Les gens
    118 qui citent cette interprétation la présentent comme une reformulation de la
    119 position de base fixée dans la Constitution ; en d'autres termes, elle est
    120 censée être équivalente au marchandage du copyright.</p>
    121 <p>
    122 Mais les deux interprétations sont loin d'être équivalentes ; elles sont
    123 différentes dans leurs concepts comme dans leurs implications. Le concept
    124 d'équilibre suppose que les intérêts des lecteurs et des éditeurs ne se
    125 différencient en importance que de manière quantitative, dans le
    126 <em>poids</em> que nous leur donnons et dans les cas auxquels ils
    127 s'appliquent. Le terme « parties prenantes » sert souvent à formuler le
    128 problème dans ce sens ; il suppose que tous les intérêts à prendre en compte
    129 dans une décision politique sont d'égale importance. Cette vision des choses
    130 rejette la distinction qualitative entre les intérêts des lecteurs et ceux
    131 des éditeurs, qui est à l'origine de la participation des pouvoirs publics
    132 au marchandage du copyright.</p>
    133 <p>
    134 Les conséquences de cette altération ne sont pas négligeables, car ce qui
    135 protège le mieux le public dans le marchandage du copyright (l'idée que les
    136 privilèges impliqués ne se justifient qu'au nom des lecteurs, jamais au nom
    137 des éditeurs) est abandonnée par l'interprétation de
    138 « l'équilibre ». Puisque l'intérêt des éditeurs est considéré comme une fin
    139 en soi, il peut justifier des privilèges ; en d'autres termes, le concept de
    140 « l'équilibre » signifie que des privilèges octroyés à quelqu'un d'autre que
    141 le public peuvent se justifier .</p>
    142 <p>
    143 Sur le plan pratique, la conséquence du concept de « l'équilibre » est de
    144 renverser la charge de la justification dans les modifications de la loi sur
    145 le copyright. Le marchandage du copyright charge les éditeurs de convaincre
    146 les lecteurs de céder certaines libertés. Le concept de l'équilibre renverse
    147 cette charge, car il n'y a généralement aucun doute que ces modifications
    148 donnent aux éditeurs des privilèges supplémentaires. Ainsi, à moins que le
    149 préjudice pour les lecteurs ne soit avéré, suffisant pour « surpasser » ce
    150 bénéfice, nous sommes amenés à conclure que les éditeurs sont autorisés à
    151 obtenir presque tous les privilèges qu'ils réclament.</p>
    152 <p>
    153 Puisque l'idée « d'établir l'équilibre » entre les éditeurs et les lecteurs
    154 nie la primauté des lecteurs à laquelle ils sont habilités, nous devons la
    155 rejeter.</p>
    156 
    157 <h3>Équilibrer contre quoi ?</h3>
    158 <p>
    159 Quand le gouvernement achète quelque chose pour le public, il agit pour le
    160 compte du public ; sa responsabilité est d'obtenir la meilleure transaction
    161 possible – meilleure pour le public, pas pour l'autre partie prenante du
    162 contrat.</p>
    163 <p>
    164 Par exemple, lorsqu'il signe des contrats avec des entreprises pour
    165 construire une autoroute, le gouvernement essaie de dépenser le moins
    166 possible d'argent public. Les agences du gouvernement font des appels
    167 d'offres pour faire baisser les prix.</p>
    168 <p>
    169 En pratique, le prix ne peut être nul, car les entrepreneurs ne feront pas
    170 d'offre aussi basse. Bien qu'ils n'aient pas droit à une considération
    171 particulière, ils ont les mêmes droits que tout citoyen d'une société libre,
    172 y compris celui de refuser des contrats désavantageux ; même l'offre la plus
    173 basse sera largement suffisante pour qu'un entrepreneur fasse du
    174 bénéfice. Donc il y a en effet une sorte d'équilibre. Mais il ne s'agit pas
    175 d'un équilibre délibéré de deux intérêts, chacun revendiquant une
    176 considération spéciale. Il s'agit d'un équilibre entre un objectif public et
    177 les forces du marché. Le gouvernement essaie d'obtenir pour les
    178 contribuables automobilistes la meilleure transaction possible dans le
    179 contexte d'une société libre et d'un marché libre.</p>
    180 <p>
    181 Dans le marchandage du copyright, le gouvernement dépense notre liberté au
    182 lieu de notre argent. La liberté est plus précieuse que l'argent, aussi la
    183 responsabilité du gouvernement de dépenser avec sagesse et parcimonie
    184 est-elle encore plus grande lorsqu'il s'agit de notre liberté que lorsqu'il
    185 s'agit de notre argent. Les gouvernements ne doivent jamais mettre les
    186 intérêts des éditeurs sur un pied d'égalité avec la liberté du public.</p>
    187 
    188 <h3>Pas « équilibre », mais « compromis »</h3>
    189 <p>
    190 L'idée d'équilibre entre les intérêts des lecteurs et les intérêts des
    191 éditeurs est une mauvaise manière d'évaluer la politique du copyright, mais
    192 il y a en effet deux intérêts à soupeser : deux intérêts <b>des
    193 lecteurs</b>. Les lecteurs ont intérêt à garder leur propre liberté dans
    194 l'usage des œuvres publiées ; selon les circonstances, ils peuvent aussi
    195 avoir intérêt à en encourager la publication par un système d'incitations.</p>
    196 <p>
    197 Le mot « équilibre », dans les discussions sur le copyright, est devenu un
    198 raccourci pour l'idée « d'établir un équilibre » entre les lecteurs et les
    199 éditeurs. Pour cette raison, utiliser le mot « équilibre » en ce qui
    200 concerne les deux intérêts des lecteurs sèmerait la confusion <a class="ftn"
    201 id="f1-rev" href="#footnote1">[1]</a>. Nous avons besoin d'un autre terme.</p>
    202 <p>
    203 En général, quand une des parties a deux objectifs partiellement en conflit
    204 et ne peut atteindre complètement aucun d'eux, nous appelons cela un
    205 « compromis ». Par conséquent, plutôt que de parler « d'établir le bon
    206 équilibre » entre parties, nous parlerons de « trouver le bon compromis
    207 entre dépenser notre liberté et la garder ».</p>
    208 
    209 <h3>La deuxième erreur : maximiser le rendement</h3>
    210 <p>
    211 La deuxième erreur dans la politique du copyright consiste à adopter
    212 l'objectif de maximiser (et pas seulement d'augmenter) le nombre d'œuvres
    213 publiées. Le concept erroné « d'établir l'équilibre » élevait les éditeurs à
    214 parité avec les lecteurs ; cette erreur les place bien au-dessus des
    215 lecteurs.</p>
    216 <p>
    217 Quand nous achetons quelque chose, nous n'achetons généralement pas tout le
    218 stock, ni le modèle le plus cher; nous conservons des fonds pour d'autres
    219 achats, en achetant seulement ce dont nous avons besoin et en choisissant
    220 pour chaque article un modèle de qualité suffisante plutôt que de la
    221 meilleure qualité possible. Le principe des rendements décroissants suggère
    222 que dépenser tout notre argent pour un seul article est probablement une
    223 répartition inefficace des ressources ; nous choisissons en général de
    224 garder de l'argent pour une autre utilisation.</p>
    225 <p>
    226 Les rendements décroissants s'appliquent au copyright comme à n'importe quel
    227 autre achat. Les premières libertés que nous devrions négocier sont celles
    228 qui nous manqueront le moins, tout en donnant le plus grand encouragement à
    229 la publication. À mesure que nous négocions des libertés additionnelles qui
    230 touchent de plus près notre vie quotidienne, nous constatons que chaque
    231 négociation entraîne un plus grand sacrifice que la précédente, alors
    232 qu'elle apporte un plus faible accroissement de l'activité littéraire. Bien
    233 avant que l'accroissement ne devienne nul, nous pourrions tout à fait dire
    234 que cela ne vaut pas le prix marginal ; nous choisirions alors une
    235 transaction dont le résultat global serait d'augmenter le nombre de
    236 publications, mais pas en le poussant à l'extrême.</p>
    237 <p>
    238 Accepter l'objectif de maximiser la publication rejette par avance toutes
    239 ces négociations plus sages et plus avantageuses. Cela exige que le public
    240 cède presque toutes ses libertés dans l'utilisation des œuvres publiées,
    241 pour seulement un petit peu plus de publication.</p>
    242 
    243 <h3>La rhétorique de la maximisation</h3>
    244 <p>
    245 En pratique, l'objectif de maximiser la publication sans tenir compte de ce
    246 que cela coûte en liberté est soutenu par une rhétorique très répandue qui
    247 affirme que la reproduction d'une œuvre par le public est illégitime,
    248 injuste et intrinsèquement mauvaise. Par exemple, les éditeurs appellent les
    249 gens qui copient « pirates », un terme diffamatoire conçu pour assimiler le
    250 partage de l'information avec votre voisin à l'attaque d'un navire (ce terme
    251 diffamatoire était autrefois utilisé par les auteurs pour décrire les
    252 éditeurs qui avaient trouvé des voies légales pour publier des éditions non
    253 autorisées ; son usage moderne par les éditeurs est presque tout le
    254 contraire). Cette rhétorique rejette directement la base constitutionnelle
    255 du copyright, mais se caractérise elle-même comme représentant la tradition
    256 incontestée du droit américain.</p>
    257 <p>
    258 Typiquement, la rhétorique du « pirate » est acceptée, car elle inonde les
    259 médias de sorte que peu de gens réalisent combien elle est radicale. Elle
    260 est efficace, car, si la copie par le public est fondamentalement
    261 illégitime, nous ne pourrons jamais nous opposer à l'obligation, imposée par
    262 les éditeurs, d'abdiquer notre liberté de la pratiquer. En d'autres termes,
    263 quand le public est mis au défi de démontrer pourquoi les éditeurs ne
    264 devraient pas bénéficier de pouvoir supplémentaire, la raison la plus
    265 importante de toutes – « Nous voulons copier » – est disqualifiée d'avance.</p>
    266 <p>
    267 Cela ne laisse aucun moyen d'argumenter contre l'augmentation de pouvoir du
    268 copyright, excepté en utilisant des enjeux secondaires. De ce fait,
    269 l'opposition actuelle aux pouvoirs accrus du copyright cite presque
    270 exclusivement des enjeux secondaires et n'ose jamais citer la liberté de
    271 distribuer des copies comme une valeur publique légitime.</p>
    272 <p>
    273 Concrètement, le principe de maximisation permet aux éditeurs d'argumenter
    274 qu'« une certaine pratique réduit nos ventes, ou nous pensons que cela
    275 pourrait être le cas, ce qui nous laisse supposer qu'elle diminue la
    276 publication en proportion inconnue; donc elle doit être interdite ». Nous
    277 sommes amenés à la conclusion inadmissible que le bien public se mesure à
    278 l'aune des ventes des éditeurs : ce qui est bon pour General Media est bon
    279 pour les États-Unis.</p>
    280 
    281 <h3>La troisième erreur : maximiser le pouvoir des éditeurs</h3>
    282 <p>
    283 Une fois que les éditeurs auront obtenu notre assentiment à l'objectif
    284 politique de maximiser le rendement de la publication à n'importe quel coût,
    285 leur prochaine étape sera de conclure que cela requiert de leur donner le
    286 maximum de pouvoir possible, en faisant couvrir par le copyright chaque
    287 utilisation imaginable d'une œuvre ou en appliquant quelque autre instrument
    288 juridique, tel que des licences « sous plastique » <i>[shrink-wrap
    289 licenses]</i>,<a href="#TransNote2" id="TransNote2-rev"><sup>b</sup></a> à
    290 effet équivalent. Cet objectif, qui entraîne l'abolition de « l'usage
    291 raisonnable » <i>[fair use]</i> et du « droit de la première vente »
    292 <i>[right of first sale]</i>,<a href="#TransNote3"
    293 id="TransNote3-rev"><sup>c</sup></a> est martelé à tous les niveaux
    294 possibles de gouvernement, des États américains aux instances
    295 internationales.</p>
    296 <p>
    297 Cette démarche est erronée, car des règles strictes sur le copyright
    298 empêchent la création de nouvelles œuvres utiles. Par exemple, Shakespeare a
    299 emprunté les intrigues de quelques-unes de ses pièces à d'autres pièces
    300 publiées quelques dizaines d'années auparavant ; donc, si la loi actuelle
    301 sur le copyright avait été en application, ses pièces auraient été
    302 illégales.</p>
    303 <p>
    304 Même si nous voulions obtenir le rythme de publication le plus élevé
    305 possible, sans tenir compte de ce que cela coûterait au public, maximiser le
    306 pouvoir des éditeurs serait un mauvais moyen d'y parvenir. Comme moyen de
    307 promouvoir le progrès, ce serait autodestructeur.</p>
    308 
    309 <h3>Les conséquences de ces trois erreurs</h3>
    310 <p>
    311 La tendance actuelle de la législation sur le copyright est de donner aux
    312 éditeurs des pouvoirs plus étendus sur des périodes plus longues. Le concept
    313 fondamental de copyright, tel qu'il ressort déformé de cette suite
    314 d'erreurs, offre rarement une base pour dire non. Les législateurs font
    315 semblant de s'intéresser à l'idée que le copyright doive servir le public,
    316 alors qu'en fait ils donnent aux éditeurs tout ce qu'ils demandent.</p>
    317 <p>
    318 Voici par exemple ce que disait le sénateur Hatch en présentant S. 483, une
    319 proposition de loi de 1995 visant à prolonger le bail du copyright de vingt
    320 ans :</p>
    321 
    322 <blockquote><p>
    323 Nous en sommes maintenant arrivés à ce point, je crois, sur la question de
    324 savoir si la période actuelle du copyright protège de façon adéquate les
    325 intérêts des auteurs et sur la question annexe de savoir si la durée de
    326 protection fournit une motivation suffisante pour la création de nouvelles
    327 œuvres d'auteurs.
    328 </p></blockquote>
    329 <p>
    330 Cette proposition de loi étendait le copyright sur les œuvres déjà publiées
    331 écrites depuis les années 1920 – un cadeau aux éditeurs sans bénéfice
    332 possible pour le public, puisqu'il n'y a aucun moyen d'augmenter
    333 rétroactivement le nombre de livres publiés à l'époque. Néanmoins, cela a
    334 coûté au public une liberté qui est significative aujourd'hui, la liberté de
    335 redistribuer des livres de cette période. Notez l'usage du terme de
    336 propagande « <a
    337 href="/philosophy/words-to-avoid.html#Protection">protéger</a> » qui incarne
    338 la deuxième des trois erreurs.</p>
    339 <p>
    340 Cette proposition étendait aussi le copyright d'œuvres à venir. Pour les
    341 œuvres créées sur commande, le copyright durerait quatre-vingt-quinze ans au
    342 lieu des soixante-quinze actuels. Théoriquement, cela augmenterait
    343 l'incitation à écrire de nouvelles œuvres ; mais pourquoi ne pas obliger
    344 tout éditeur qui prétend avoir besoin de cette surprime à justifier sa
    345 revendication avec des projections de bilan à 75 ans d'échéance ?</p>
    346 <p>
    347 Le Congrès n'a pas remis en question les arguments des éditeurs, cela va
    348 sans dire : une loi étendant le copyright fut promulguée en 1998. Elle fut
    349 appelée <i>« Sonny Bono Copyright Term Extension Act »</i>,<a
    350 href="#TransNote4" id="TransNote4-rev"><sup>d</sup></a> d'après le nom de
    351 l'un de ses soutiens qui était décédé un peu plus tôt cette année-là. Nous
    352 l'appelons habituellement <i>« Mickey Mouse Copyright Act »</i> (loi sur le
    353 copyright de Mickey). La veuve de Bono, qui l'a remplacé à la Chambre des
    354 représentants jusqu'à la fin de son mandat, fit cette déclaration :</p>
    355 
    356 <blockquote><p>
    357 En fait, Sonny voulait que le copyright dure à jamais. J'ai été informée par
    358 mes assistants qu'un tel changement violerait la Constitution. Je vous
    359 invite tous à travailler avec moi pour renforcer nos lois sur le copyright
    360 par tous les moyens à notre disposition. Comme vous le savez, il y a aussi
    361 la proposition de Jack Valenti pour que cela dure à jamais moins un
    362 jour. Peut-être que la commission l'examinera au prochain Congrès.
    363 </p></blockquote>
    364 <p>
    365 Plus tard, la Cour suprême a été saisie d'une affaire qui cherchait à
    366 annuler cette loi en se basant sur le fait que l'extension rétroactive
    367 desservait l'objectif de promotion du progrès inscrit dans la
    368 Constitution. La Cour a répondu en abdiquant sa responsabilité de juger
    369 cette question ; en ce qui concerne le copyright, la Constitution se
    370 contente de belles paroles.</p>
    371 <p>
    372 Une autre loi, votée en 1997, a transformé en délit pénal le fait de
    373 réaliser un nombre important de copies d'une œuvre publiée, même si c'est
    374 pour faire plaisir à vos amis. Auparavant, ce n'était pas du tout illégal
    375 aux États-Unis.</p>
    376 <p>
    377 Pire encore, la loi dite <abbr title="Digital Millennium Copyright
    378 Act">DMCA</abbr> <a href="#TransNote5" id="TransNote5-rev"><sup>e</sup></a>
    379 a été conçue pour ranimer ce qui était alors appelé « protection contre la
    380 copie » (aujourd'hui connue sous le nom de gestion numérique des
    381 restrictions ou <a href="/proprietary/proprietary-drm.html">DRM</a>) – bête
    382 noire des utilisateurs de l'informatique déjà à l'époque – en rendant
    383 illégal le fait d'outrepasser ses restrictions, ou même de publier toute
    384 information sur le moyen de les outrepasser. Cette loi devrait s'appeler
    385 « <i>Domination by Media Corporations Act</i> » (loi sur la domination par
    386 les sociétés de médias) parce qu'elle offre effectivement aux éditeurs
    387 l'occasion d'écrire leur propre loi sur le copyright. Elle dit qu'ils
    388 peuvent imposer toute restriction, quelle qu'elle soit, sur l'utilisation de
    389 l'œuvre, et ces restrictions prennent force de loi pour peu que l'œuvre
    390 contienne un moyen de chiffrement ou un gestionnaire de licence pour les
    391 faire respecter.</p>
    392 <p>
    393 Un des arguments avancés pour faire passer cette loi était qu'elle mettait
    394 en application un traité récent augmentant les pouvoirs du copyright. Ce
    395 traité avait été adopté par les États membres de l'Organisation mondiale de
    396 la <a href="/philosophy/not-ipr.html">propriété intellectuelle</a> (OMPI),
    397 un organisme dominé par les intérêts des détenteurs de copyrights et de
    398 brevets, avec l'aide de la pression exercée par l'administration Clinton ;
    399 puisque le traité ne faisait qu'augmenter le pouvoir du copyright, qu'il
    400 serve l'intérêt du public dans un pays quelconque semble douteux. En tout
    401 cas, la loi allait bien au-delà de ce que requérait le traité.</p>
    402 <p>
    403 Les bibliothèques furent un des piliers de l'opposition à cette loi, en
    404 particulier aux articles qui bloquent les formes de copie considérées comme
    405 « usage raisonnable ». Comment les éditeurs ont-ils répondu ? L'ancien
    406 député Pat Schroeder, maintenant lobbyiste pour l'Association des éditeurs
    407 américains, dit que les éditeurs « n'auraient pas pu vivre avec ce que [les
    408 bibliothèques] demandaient ». Puisque les bibliothèques demandaient
    409 seulement de préserver une partie du statu quo, on aurait pu répondre en se
    410 demandant comment les éditeurs avaient survécu jusque-là.</p>
    411 <p>
    412 Barney Frank, un membre du Congrès, montra lors d'une rencontre avec moi et
    413 d'autres opposants combien avait été dédaignée la vision du copyright
    414 contenue dans la Constitution américaine. Il dit que ces nouveaux pouvoirs,
    415 appuyés par des sanctions pénales, étaient nécessaires de toute urgence, car
    416 « l'industrie du film était inquiète », tout autant que « l'industrie de la
    417 musique » et d'autres « industries ».  Je lui demandai : « Mais est-ce dans
    418 l'intérêt du public ? » Sa réponse fut : « Pourquoi parlez-vous de l'intérêt
    419 du public ? Ces créatifs n'ont pas à abandonner leurs droits dans l'intérêt
    420 du public ! » L'industrie » était assimilée aux « créatifs » qu'elle
    421 emploie, le copyright traité comme lui revenant de droit et la Constitution
    422 mise sens dessus dessous.</p>
    423 <p>
    424 La DMCA a été promulguée en 1998. Elle dit que l'usage raisonnable demeure
    425 théoriquement légitime, mais autorise les éditeurs à interdire tout logiciel
    426 ou matériel avec lequel vous pourriez le mettre en application. En fait,
    427 l'usage raisonnable est interdit.</p>
    428 <p>
    429 En se fondant sur cette loi, l'industrie du cinéma a imposé une censure sur
    430 le logiciel libre pour la lecture des DVD, et même sur l'information
    431 concernant la façon dont on les lit. En avril 2001, le professeur Edward
    432 Felten de l'université de Princeton, intimidé par des menaces de procès
    433 provenant de la <abbr title="Recording Industry Association of
    434 America">RIAA</abbr>,<a href="#TransNote6"
    435 id="TransNote6-rev"><sup>f</sup></a> retira un document scientifique
    436 exposant ce qu'il avait appris au sujet d'une proposition de système de
    437 chiffrement destiné à restreindre l'accès à de la musique enregistrée.</p>
    438 <p>
    439 Nous commençons aussi à voir des livres électroniques qui retirent aux
    440 lecteurs beaucoup de leurs libertés traditionnelles ; par exemple, la
    441 liberté de prêter un livre à un ami, de le vendre à un bouquiniste, de
    442 l'emprunter à une bibliothèque, de l'acheter sans donner son nom à la banque
    443 de données d'une société, et même la liberté de le lire deux fois. Les
    444 livres chiffrés limitent généralement toutes ces activités : vous ne pouvez
    445 les lire qu'avec un logiciel de déchiffrement spécial conçu pour vous
    446 enfermer.</p>
    447 <p>
    448 Je n'achèterai jamais aucun de ces livres chiffrés et verrouillés et
    449 j'espère que vous les rejetterez aussi. Si un livre électronique ne vous
    450 donne pas les mêmes libertés qu'un livre imprimé traditionnel, ne l'acceptez
    451 pas !</p>
    452 <p>
    453 Quiconque publie de manière indépendante un logiciel qui peut lire des
    454 livres électroniques chiffrés risque des poursuites. Un programmeur russe,
    455 Dmitry Sklyarov, a été arrêté en 2001 pendant une visite aux États-Unis où
    456 il participait à un congrès comme conférencier, car il avait écrit un tel
    457 programme en Russie, où il était légal de le faire. Maintenant la Russie
    458 prépare également une loi pour l'interdire, et l'Union européenne en a
    459 adopté une récemment.</p>
    460 <p>
    461 Le marché de masse des livres électroniques a été jusqu'à présent un échec
    462 commercial, non parce que les lecteurs ont choisi de défendre leurs
    463 libertés, mais pour d'autres raisons, en particulier le fait que les écrans
    464 d'ordinateurs ne sont pas des surfaces agréables pour lire. Nous ne pouvons
    465 pas compter sur cet heureux accident pour nous protéger sur le long terme ;
    466 la prochaine tentative de promouvoir les livres électroniques utilisera le
    467 « papier électronique », des objets ressemblant à des livres dans lesquels
    468 des livres électroniques chiffrés et restrictifs peuvent être
    469 téléchargés. Si cette surface à l'apparence de papier se révèle plus
    470 attrayante que les écrans, nous ne pourrons conserver notre liberté qu'en la
    471 défendant. Entre-temps, les livres électroniques font des incursions dans
    472 certains créneaux : les écoles dentaires de l'université de New York et
    473 d'ailleurs exigent de leurs étudiants qu'ils achètent leurs manuels sous
    474 forme de livres électroniques restrictifs.</p>
    475 <p>
    476 Et pourtant, les sociétés de médias ne sont pas satisfaites. En 2001, le
    477 sénateur Hollings (financé par Disney) a proposé une loi appelée <abbr
    478 title="Security Systems Standards and Certification Act">SSSCA</abbr> <a
    479 href="#TransNote7" id="TransNote7-rev"><sup>g</sup></a> <a class="ftn"
    480 id="f2-rev" href="#footnote2">[2]</a> qui rendrait obligatoires sur tous les
    481 ordinateurs (et autres appareils d'enregistrement et de lecture numériques)
    482 des systèmes de restriction de copie imposés par le gouvernement. Ceci est
    483 leur but ultime, mais la première étape de leur plan est d'interdire tout
    484 équipement qui puisse capter la télévision numérique haute définition
    485 (HDTV), à moins qu'il ne soit conçu pour empêcher le public de le
    486 « bricoler » (c'est-à-dire, de le modifier pour son propre usage). Puisque
    487 le logiciel libre est un logiciel que les utilisateurs peuvent modifier,
    488 nous sommes là, pour la première fois, face à un projet de loi qui interdit
    489 explicitement le logiciel libre pour certains usages. Son interdiction pour
    490 d'autres usages suivra sûrement. Si la <abbr title="Federal Communications
    491 Commission">FCC</abbr> <a href="#TransNote8"
    492 id="TransNote8-rev"><sup>h</sup></a> adopte cette réglementation, des
    493 logiciels libres existants tels que GNU Radio seront censurés.</p>
    494 <p>
    495 Le blocage de ces propositions de lois et de ces réglementations requiert
    496 une action politique <a class="ftn" id="f3-rev" href="#footnote3">[3]</a>.</p>
    497 
    498 <h3>Trouver le marchandage correct</h3>
    499 <p>
    500 Quelle est la méthode appropriée pour décider de la politique du copyright ?
    501 Si le copyright est un marchandage mené pour le compte du public, il doit
    502 servir l'intérêt du public avant tout. Le devoir du gouvernement en vendant
    503 la liberté du public est de vendre seulement ce qui doit l'être et de le
    504 vendre le plus chèrement possible. À tout le moins, nous devrions réduire
    505 autant que possible l'extension du copyright tout en maintenant un niveau
    506 comparable de publication.</p>
    507 <p>
    508 Puisque nous ne pouvons pas trouver ce prix minimum en termes de liberté par
    509 des appels d'offres, comme nous le faisons pour des projets de construction,
    510 comment pouvons-nous le trouver ?</p>
    511 <p>
    512 L'une des méthodes possibles est de réduire les privilèges du copyright par
    513 palier et d'observer les résultats. En voyant si des diminutions
    514 significatives de publication surviennent, et à quel moment, nous
    515 apprendrons quel pouvoir le copyright doit effectivement posséder pour
    516 réaliser les objectifs du public. Nous devons juger cela par une observation
    517 factuelle, pas par ce que nous prédisent les éditeurs, car ils ont toutes
    518 les raisons de prédire exagérément leur propre ruine si leurs pouvoirs sont
    519 réduits d'une quelconque façon.</p>
    520 <p>
    521 La politique du copyright comprend plusieurs aspects indépendants, qui
    522 peuvent être ajustés séparément. Après avoir trouvé le minimum nécessaire
    523 pour un des aspects de cette politique, il est encore possible de réduire
    524 d'autres aspects du copyright tout en maintenant le niveau de publication
    525 désiré.</p>
    526 <p>
    527 Un aspect important du copyright est sa durée, laquelle est maintenant
    528 typiquement de l'ordre du siècle. Réduire le monopole de la copie à dix ans,
    529 en partant de la date à laquelle l'œuvre est publiée, serait une bonne
    530 première étape. Un autre aspect, qui couvre la réalisation d'œuvres
    531 dérivées, pourrait avoir une durée plus longue.</p>
    532 <p>
    533 Pourquoi partir de la date de publication ? Parce que le copyright sur les
    534 œuvres non publiées ne limite pas directement la liberté des lecteurs ; la
    535 liberté de copier une œuvre est sans objet quand nous n'en possédons aucun
    536 exemplaire. Ainsi, donner aux auteurs un temps plus long pour faire publier
    537 une œuvre (dont ils possèdent généralement le copyright avant publication)
    538 n'est pas préjudiciable, car ils choisissent rarement d'en retarder la
    539 publication dans le seul but de repousser le terme de leur copyright.</p>
    540 <p>
    541 Pourquoi dix ans ? Parce que c'est une proposition sûre ; nous pouvons être
    542 assurés pour des raisons pratiques que cette réduction aurait de nos jours
    543 un impact minime sur la viabilité globale de l'industrie de l'édition. Dans
    544 la plupart des médias et des genres, les œuvres à succès sont très rentables
    545 en quelques années seulement, et de toute façon la plupart sont épuisées
    546 bien avant dix ans. Même pour les œuvres de référence, dont l'utilité peut
    547 aller jusqu'à plusieurs décennies, dix ans de copyright suffiraient : des
    548 éditions mises à jour sont publiées régulièrement, et beaucoup de lecteurs
    549 achèteront l'édition sous copyright plutôt que de copier la version du
    550 domaine public, vieille de dix ans.</p>
    551 <p>
    552 Dix ans est peut-être même plus long que nécessaire ; une fois la situation
    553 stabilisée, nous pourrions essayer une autre réduction pour ajuster le
    554 système. À une table ronde sur le copyright lors d'une convention
    555 littéraire, où je proposais le bail de dix ans, un célèbre auteur de fiction
    556 assis à côté de moi objecta avec véhémence qu'au-delà de cinq ans, c'était
    557 intolérable.</p>
    558 <p>
    559 Mais nous n'avons pas à appliquer la même durée à toutes les catégories
    560 d'œuvres. Maintenir une stricte uniformité dans la politique du copyright
    561 n'est pas crucial pour l'intérêt public, et la loi sur le copyright a déjà
    562 beaucoup d'exceptions pour des usages et des médias spécifiques. Il serait
    563 absurde de payer pour chaque projet d'autoroute le prix des projets les plus
    564 difficiles dans les régions les plus chères du pays ; il serait également
    565 absurde de « payer » pour toutes les catégories d'art, en termes de liberté,
    566 le prix le plus élevé que nous trouverions nécessaire pour un art
    567 particulier.</p>
    568 <p>
    569 Ainsi, peut-être que les romans, les dictionnaires, les logiciels, les
    570 chansons, les symphonies et les films devraient avoir des durées de
    571 copyright différentes, de sorte que nous puissions réduire la durée pour
    572 chaque type d'œuvre à ce qui est nécessaire pour que de nombreuses œuvres de
    573 ce type soient publiées. Peut-être que les films de plus d'une heure
    574 pourraient avoir un copyright de vingt ans, à cause de leur coût de
    575 production. Dans mon propre domaine, la programmation de logiciels, trois
    576 ans devraient suffire, car les cycles de production sont encore plus courts.</p>
    577 <p>
    578 Un autre aspect du copyright est l'extension de l'usage raisonnable (la
    579 reproduction de tout ou partie d'une œuvre publiée qui est légalement
    580 permise même si elle est couverte par le copyright). La première étape
    581 naturelle pour réduire cet aspect du pouvoir du copyright est de permettre
    582 la copie et la distribution privée et occasionnelle, à but non commercial,
    583 en petite quantité, entre particuliers. Ceci éliminerait l'intrusion de la
    584 police du copyright dans la vie privée des gens, mais aurait probablement
    585 peu d'effet sur les ventes d'œuvres publiées (il peut être nécessaire de
    586 prendre d'autres dispositions législatives pour s'assurer que les licences
    587 sous plastique ne puissent pas être utilisées pour se substituer au
    588 copyright en restreignant ce type de copie). L'expérience de Napster montre
    589 que nous devrions aussi permettre la reproduction et la distribution non
    590 commerciale au public : lorsque tant de gens veulent copier et partager et
    591 trouvent cela utile, seules des mesures draconiennes les arrêteront, et le
    592 public mérite d'avoir ce qu'il veut.</p>
    593 <p>
    594 Pour les romans, et en général pour les œuvres destinées au divertissement,
    595 la redistribution non commerciale peut être une liberté suffisante pour les
    596 lecteurs. Les logiciels, puisqu'ils sont utilisés à des fins fonctionnelles
    597 (pour effectuer des tâches), demandent des libertés supplémentaires, y
    598 compris celle de publier une version améliorée. Voir « Définition du
    599 logiciel libre », dans ce livre, pour une explication des libertés que
    600 doivent posséder les utilisateurs de logiciels. Mais ce pourrait être un
    601 compromis acceptable que d'attendre deux ou trois ans à compter de la date
    602 de publication du logiciel pour rendre ces libertés universelles.</p>
    603 <p>
    604 Des changements comme ceux-ci pourraient amener le copyright à être en phase
    605 avec le souhait du public d'utiliser les technologie numériques pour
    606 copier. Les éditeurs trouveront ces propositions sans aucun doute
    607 « déséquilibrées » ; ils pourront menacer de retirer leurs billes et de
    608 rentrer chez eux, mais ils ne le feront sûrement pas, car le jeu restera
    609 profitable et il n'y aura pas d'autre choix.</p>
    610 <p>
    611 Lorsque nous envisagerons les réductions du pouvoir du copyright, nous
    612 devrons nous assurer que les sociétés de médias ne les remplaceront pas tout
    613 simplement par un contrat de licence utilisateur. Il serait nécessaire
    614 d'interdire l'utilisation de contrats qui appliquent des restrictions sur la
    615 copie allant au-delà de celles du copyright. De telles limitations sur ce
    616 que peuvent exiger les contrats non négociés du marché de masse sont une
    617 constante du droit américain.</p>
    618 
    619 <h3>Remarque personnelle</h3>
    620 <p>
    621 Je suis concepteur de logiciels, pas expert en droit. Je me suis intéressé
    622 aux problèmes du copyright, car il n'y a pas moyen de les éviter dans le
    623 monde de réseaux d'ordinateurs qu'est Internet. En tant qu'utilisateur de
    624 l'informatique et des réseaux depuis trente ans, je peux évaluer les
    625 libertés que nous avons perdues et celles que nous pourrions perdre
    626 bientôt. En tant qu'auteur, je peux rejeter la mystique romantique de
    627 l'auteur considéré comme <a
    628 href="/philosophy/words-to-avoid.html#Creator">créateur</a> semi-divin,
    629 souvent citée par les éditeurs pour justifier l'augmentation des pouvoirs du
    630 copyright accordée aux auteurs – lesquels signent ensuite leur renonciation
    631 à ces pouvoirs au bénéfice des éditeurs.</p>
    632 <p>
    633 Cet article repose en grande partie sur des faits et des arguments que vous
    634 pouvez vérifier, et sur des propositions sur lesquelles vous pouvez vous
    635 faire votre propre opinion. Mais je vous demande d'accepter une seule chose
    636 de mon discours : que les auteurs comme moi ne méritent pas de pouvoirs
    637 spéciaux à votre détriment. Si vous voulez mieux me récompenser pour des
    638 logiciels ou des livres que j'ai écrits, j'accepterais volontiers un
    639 chèque ; mais s'il vous plaît, n'abandonnez pas votre liberté en mon nom.</p>
    640 <div class="column-limit"></div>
    641 
    642 <h3 class="footnote">Notes</h3>
    643 <ol>
    644 <li id="footnote1"><a href="#f1-rev" class="nounderline">&#8593;</a>
    645 Voir l'article de Julian Sanchez <i>« <a
    646 href="http://www.juliansanchez.com/2011/02/04/the-trouble-with-balance-metaphors/">The
    647 Trouble With “Balance” Metaphors</a> »</i> (Le problème des « métaphores de
    648 l'équilibre »), où il analyse comment l'analogie entre un bon jugement et
    649 des poids à l'équilibre peut limiter notre pensée de façon malsaine.</li>
    650 <li id="footnote2"><a href="#f2-rev" class="nounderline">&#8593;</a>
    651 Renommé depuis par le signe imprononçable CBDTPA, pour lequel un bon moyen
    652 mnémotechnique est <i>Consume, But Don't Try Programming Anything</i>
    653 (Consomme, mais n'essaie pas de programmer quoi que ce soit), mais qui
    654 signifie vraiment <i>Consumer Broadband and Digital Television Promotion
    655 Act</i> (Loi sur la promotion de la télévision numérique à large bande du
    656 consommateur).</li>
    657 <li id="footnote3"><a href="#f3-rev" class="nounderline">&#8593;</a>
    658 Si vous voulez apporter votre aide, je vous recommande les sites <a
    659 href="https://www.defectivebydesign.org/">DefectiveByDesign.org</a>, <a
    660 href="https://www.publicknowledge.org/">publicknowledge.org</a> et <a
    661 href="https://www.eff.org/">eff.org</a>.</li>
    662 </ol>
    663 
    664 <hr class="no-display" />
    665 <div class="edu-note c"><p id="fsfs">Cet essai est publié dans <a
    666 href="https://shop.fsf.org/product/free-software-free-society/"><cite>Free
    667 Software, Free Society: The Selected Essays of Richard
    668 M. Stallman</cite></a>.</p></div>
    669 </div>
    670 
    671 <div class="translators-notes">
    672 
    673 <!--TRANSLATORS: Use space (SPC) as msgstr if you don't have notes.-->
    674 <b>Notes de traduction</b><ol id="translator-notes-alpha">
    675 <li><a id="TransNote1" href="#TransNote1-rev"
    676 class="nounderline">&#8593;</a>
    677 Le copyright américain a beaucoup de points communs avec le droit d'auteur
    678 français, mais il y a aussi des différences significatives. C'est pourquoi
    679 <i>copyright</i> n'est pas traduit dans cet article.</li>
    680 <li><a id="TransNote2" href="#TransNote2-rev"
    681 class="nounderline">&#8593;</a>
    682 <i>Shrink-wrap license</i> : licence écrite sur l'emballage d'un produit,
    683 qui modifie les conditions légales d'utilisation.</li>
    684 <li><a id="TransNote3" href="#TransNote3-rev"
    685 class="nounderline">&#8593;</a>
    686 La « doctrine de la première vente » (qui a été avalisée par la Cour suprême
    687 en 1909 et introduite dans le Code des États-Unis en 1976) est une
    688 limitation du copyright qui permet à la personne ayant acheté de manière
    689 licite un exemplaire d'une œuvre sous copyright de le transférer
    690 (c'est-à-dire le vendre, le prêter ou le donner) sans permission
    691 spéciale.</li>
    692 <li><a id="TransNote4" href="#TransNote4-rev"
    693 class="nounderline">&#8593;</a>
    694 Loi de Sonny Bono sur l'extension du copyright.</li>
    695 <li><a id="TransNote5" href="#TransNote5-rev"
    696 class="nounderline">&#8593;</a>
    697 Loi sur le copyright du millénaire numérique.</li>
    698 <li><a id="TransNote6" href="#TransNote6-rev"
    699 class="nounderline">&#8593;</a>
    700 Association américaine des industries de l'enregistrement.</li>
    701 <li><a id="TransNote7" href="#TransNote7-rev"
    702 class="nounderline">&#8593;</a>
    703 Loi sur la normalisation et la certification des systèmes de sécurité.</li>
    704 <li><a id="TransNote8" href="#TransNote8-rev"
    705 class="nounderline">&#8593;</a>
    706 Commission fédérale des communications, équivalente à l'Arcep
    707 française.</li>
    708 </ol></div>
    709 </div>
    710 
    711 <!-- for id="content", starts in the include above -->
    712 <!--#include virtual="/server/footer.fr.html" -->
    713 <div id="footer" role="contentinfo">
    714 <div class="unprintable">
    715 
    716 <p>Veuillez envoyer les requêtes concernant la FSF et GNU à &lt;<a
    717 href="mailto:gnu@gnu.org">gnu@gnu.org</a>&gt;. Il existe aussi <a
    718 href="/contact/">d'autres moyens de contacter</a> la FSF. Les liens
    719 orphelins et autres corrections ou suggestions peuvent être signalés à
    720 &lt;<a href="mailto:webmasters@gnu.org">webmasters@gnu.org</a>&gt;.</p>
    721 
    722 <p>
    723 <!-- TRANSLATORS: Ignore the original text in this paragraph,
    724         replace it with the translation of these two:
    725 
    726         We work hard and do our best to provide accurate, good quality
    727         translations.  However, we are not exempt from imperfection.
    728         Please send your comments and general suggestions in this regard
    729         to <a href="mailto:web-translators@gnu.org">
    730 
    731         &lt;web-translators@gnu.org&gt;</a>.</p>
    732 
    733         <p>For information on coordinating and contributing translations of
    734         our web pages, see <a
    735         href="/server/standards/README.translations.html">Translations
    736         README</a>. -->
    737 Merci d'adresser vos commentaires sur les pages en français à &lt;<a
    738 href="mailto:trad-gnu@april.org">trad-gnu@april.org</a>&gt;, et sur les
    739 traductions en général à &lt;<a
    740 href="mailto:web-translators@gnu.org">web-translators@gnu.org</a>&gt;. Si
    741 vous souhaitez y contribuer, vous trouverez dans le <a
    742 href="/server/standards/README.translations.html">guide de traduction</a>
    743 les infos nécessaires.</p>
    744 </div>
    745 
    746 <!-- Regarding copyright, in general, standalone pages (as opposed to
    747      files generated as part of manuals) on the GNU web server should
    748      be under CC BY-ND 4.0.  Please do NOT change or remove this
    749      without talking with the webmasters or licensing team first.
    750      Please make sure the copyright date is consistent with the
    751      document.  For web pages, it is ok to list just the latest year the
    752      document was modified, or published.
    753      
    754      If you wish to list earlier years, that is ok too.
    755      Either "2001, 2002, 2003" or "2001-2003" are ok for specifying
    756      years, as long as each year in the range is in fact a copyrightable
    757      year, i.e., a year in which the document was published (including
    758      being publicly visible on the web or in a revision control system).
    759      
    760      There is more detail about copyright years in the GNU Maintainers
    761      Information document, www.gnu.org/prep/maintain. -->
    762 <p>Copyright &copy; 2002, 2009, 2010, 2015, 2021 Free Software Foundation, Inc.</p>
    763 
    764 <p>Cette page peut être utilisée suivant les conditions de la licence <a
    765 rel="license"
    766 href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/deed.fr">Creative
    767 Commons attribution, pas de modification, 4.0 internationale (CC BY-ND
    768 4.0)</a>.</p>
    769 
    770 <!--#include virtual="/server/bottom-notes.fr.html" -->
    771 <div class="translators-credits">
    772 
    773 <!--TRANSLATORS: Use space (SPC) as msgstr if you don't want credits.-->
    774 Traduction : Cédric Corazza<br /> Révision : <a
    775 href="mailto:trad-gnu&#64;april.org">trad-gnu&#64;april.org</a></div>
    776 
    777 <p class="unprintable"><!-- timestamp start -->
    778 Dernière mise à jour :
    779 
    780 $Date: 2021/11/28 12:37:19 $
    781 
    782 <!-- timestamp end -->
    783 </p>
    784 </div>
    785 </div>
    786 <!-- for class="inner", starts in the banner include -->
    787 </body>
    788 </html>