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Chassell</strong> +</p> + +<p> +<!-- <br /> + +<a href="http://www.globalknowledge.org.my/"> broken link, 1apr11 --> +[D'après un discours donné lors de la deuxième <cite>Global Knowledge +Conference</cite><br /> +à Kuala Lumpur, Malaisie, le 7 mars 2000.] +</p> + +<!-- <p> + +[For a more extended discussion, see my<br /> +<a href="http://www.teak.cc/Access-speech.html"> +Free Software: Access and Empowerment</a>. +</p> --> +<p> +Le titre de cette présentation est « Façonner le développement et les +projets collaboratifs dans les <abbr title="Technologies de l'information et +de la communication">TIC</abbr> pour la prospérité mondiale » et les thèmes +de cette conférence sont : « accéder », « autonomie » +<cite>[empowerment]</cite> et « gouvernance ». +</p> +<p> +Ce que je voudrais faire aujourd'hui, c'est prendre une technologie +spécifique et vous dire comment nous avons façonné cette technologie pour la +rendre accessible et en faire un instrument d'autonomie, comment nous +l'avons placée dans un cadre économique et institutionnel qui encourage les +gens à travailler en collaboration, enfin comment elle peut être utilisée +pour une meilleure gouvernance. +</p> +<p> +Cette technologie, c'est le logiciel. Le « façonnage » dont il s'agit +concerne son cadre légal et institutionnel, c'est-à-dire les termes des +licences de copyright. +</p> +<p> +Étant un des fondateurs de la <cite>Free Software Foundation</cite>, j'ai +travaillé pendant 16 ans sur le cadre légal et institutionnel dans lequel +nous utilisons et développons le logiciel. GNU/Linux, un système logiciel +complet, est né de ces efforts. +</p> +<p> +Les TIC, technologies de l'information et de la communication, sont formées +de composants matériels et logiciels. Je ne parlerai ici que de l'aspect +logiciel. Quoi qu'il en soit, j'espère pouvoir étendre notre expérience de +ce sujet à d'autres technologies. +</p> +<p> +Quand je parle de logiciel, je veux parler aussi bien de ce qui fait tourner +l'ordinateur, c'est-à-dire le système d'exploitation, que des applications +comme le courrier électronique et autres moyens de communication, les +tableurs, le commerce électronique, les outils de traitement du texte, +l'envoi et la réception de fax, la création de sites web, l'ingénierie, la +recherche, les calculs mathématiques, la modélisation, la manipulation +d'images et les réseaux. +</p> +<p> +Ces dernières années, le prix des ordinateurs et des matériels de +communication a tellement baissé que de plus en plus de gens les +utilisent. En effet, les organisateurs de notre conférence estiment à un sur +trente le nombre de personnes dans le monde ayant un accès informatique aux +communications électroniques, qui sont connectées. +</p> +<p> +Bien que le rapport d'un sur trente représente une faible proportion de la +population mondiale, cette technologie est populaire, grandissante et +commence à prendre de plus en plus de place dans notre quotidien. De plus, +nous nous attendons à ce que les ordinateurs et les coûts des communications +continuent à baisser, pendant encore une génération au moins, ce qui +signifie que ceux qui n'y ont pas encore accès vont en fin de compte en +profiter. +</p> +<p> +Comme pour toute technologie, le logiciel peut s'utiliser d'une bonne ou +d'une mauvaise façon. +</p> +<p> +En ce moment, ce sont les deux que nous voyons. Le mauvais côté, ce sont des +machines qui plantent sans raison, des courriels qui font perdre de l'argent +à leurs destinataires, des systèmes vulnérables à de simples virus et des +programmes qui ne font qu'une partie de ce qu'on attend d'eux. +</p> +<p> +La clef du bon usage du logiciel est d'assurer la liberté. Cela entraîne +collaboration, prix moins élevés, fiabilité, efficacité, sécurité et moins +de barrières à l'entrée et à l'usage. +</p> +<p> +Pour faire bon usage de la technologie logicielle, les gens doivent avoir le +droit, garanti par la loi, de la copier, l'étudier, la modifier et la +redistribuer. Tout le reste en découle. +</p> +<p> +Le logiciel GNU/Linux donne ces droits aux gens. Les programmeurs en +bénéficient, mais plus important, les non-programmeurs aussi en bénéficient. +</p> +<p> +Par exemple, les habitants d'une zone où les services téléphoniques sont +médiocres ou inexistants peuvent utiliser un logiciel robuste, appelé UUCP, +pour leurs communications. J'ai lu récemment qu'un groupe d'Oxfam l'a fait. +</p> +<p> +Ceux qui ont de vieilles machines, même à base d'un antique 80386, peuvent +faire tourner des programmes efficaces, qui en font autant que des +programmes exigeant un Pentium moderne et de la mémoire hors de prix. Ils +peuvent très bien utiliser ces machines comme serveurs de pages web ou comme +routeurs – comme infrastructure pour les communications. +</p> +<p> +Les gens ne possédant qu'un seul ordinateur peuvent brancher un ou deux +terminaux supplémentaires, installer deux ou trois chaises devant au lieu +d'une seule, tout cela pour un surcoût modique. Je l'ai fait : un ami est +venu me rendre visite et nous voulions tous deux travailler en même temps +sur ma machine. Courriel, surf sur le web, rédaction, administration réseau, +tout cela nous l'avons fait en même temps. +</p> +<p> +Une communauté, ou une collectivité, peut créer sa propre liste de diffusion +ou son forum, privé ou public. Il est là, le « collecticiel » +<cite>[groupware]</cite>. Deux personnes ou plus peuvent travailler sur le +même document au même moment, même s'ils habitent des pays différents. La +dernière fois qu'il m'est arrivé de le faire, je travaillais avec un copain +qui était de l'autre côté de l'Atlantique. +</p> +<p> +Avec quel alphabet voulez-vous écrire ? Hindî, chinois, thaï ? Pas de +problème, et dans la même fenêtre que l'anglais ou le cyrillique. +</p> +<p> +Que ce soit une personne isolée ou un groupe, tout le monde peut construire +son site web. Un éditeur peut composer ses propres livres. Un comptable peut +analyser un budget. Les malvoyants ont la possibilité d'entendre à haute et +intelligible voix un texte via leur ordinateur. +</p> +<p> +Vous pouvez choisir parmi plusieurs interfaces graphiques, de la plus +élaborée à la plus simple et pratique, en passant par celle dont l'aspect et +le comportement rappellent Microsoft Windows. +</p> +<p> +À part le système vocal pour les malvoyants, qui demande un matériel audio +que je n'ai jamais installé sur ma machine, toutes les applications que je +viens de citer tournent sur mon ordinateur personnel. Et je connais des gens +qui ont installé le matériel audio et qui peuvent entendre les textes. +</p> +<p> +Toutes ces applications étaient sur un cédérom. Il se trouve qu'il m'avait +été donné gratuitement, mais il m'est aussi arrivé de payer des CD contenant +d'autres versions de ces programmes ; il est parfois simplement plus commode +d'acheter. Et si vous avez une connexion Internet rapide, vous pouvez +facilement télécharger le logiciel, il ne vous en coûtera que le prix de la +connexion. +</p> +<p> +Cette profusion de logiciels est disponible et peut s'utiliser n'importe où +dans le monde. +</p> +<p> +Pour revenir à la question : comment cette technologie a-t-elle été +façonnée ? Je me répète ; la clef c'est la liberté : le droit, garanti par +la loi, de copier, étudier, modifier et redistribuer le logiciel. +</p> +<p> +L'outil juridique spécifique que nous avons utilisé pour engendrer ces +libertés et les avantages qui en découlent est une licence de copyright +spécialement conçue, la <cite>GNU General Public License</cite> (licence +publique générale GNU). +</p> +<p> +Cette licence vous donne plus de droits que le copyright de base et plus de +droits que beaucoup d'autres sortes de licences de logiciel. Pour aller à +l'essentiel, elle vous interdit d'interdire. Elle vous permet de faire tout +le reste. +</p> +<p> +J'aimerais approfondir cette liste de droits : copier, étudier, modifier et +redistribuer. +</p> + +<p> +En premier lieu, le droit de copier. +</p> +<p> +Il y a peu de gens qui possèdent une usine capable de recopier une +voiture. De fait, reproduire une voiture est tellement difficile que nous +utilisons un autre mot ; nous parlons de « fabriquer » ou « construire » une +voiture. Et il n'y a pas tant que ça de constructeurs automobiles dans le +monde. Bien moins d'une personne sur trente possède une usine automobile ou +a la possibilité d'y accéder facilement. +</p> +<p> +Mais quiconque possède un ordinateur possède une usine, un moyen de +fabriquer des logiciels, autrement dit, de faire de nouvelles +copies. Puisqu'il est tellement facile de copier les logiciels, nous +n'employons pas le terme de « fabriquer » ; en général, on ne le voit même +pas sous cet angle, pourtant il s'agit bien de cela. +</p> +<p> +Le droit de copier des logiciels, c'est le droit d'utiliser vos propres +moyens de production (si vous me permettez cette expression démodée). Des +millions de gens, quelques pour cents de la population mondiale, ont entre +leurs mains ces moyens de production. +</p> +<p> +Naturellement, des efforts ont été faits pour vous enlever vos droits +d'utiliser votre bien personnel comme une usine dont vous êtes propriétaire. +</p> + +<p> +En deuxième lieu, le droit d'étudier. Ce droit n'est pas d'un intérêt +immédiat pour ceux qui ne programment pas. C'est un peu comme le droit, pour +un juriste, de lire des manuels de droit. À moins d'être juriste, c'est le +genre de livres que vous éviterez. +</p> +<p> +Et pourtant, le droit d'étudier a plusieurs implications, autant pour les +programmeurs que pour tous les autres. +</p> +<p> +Le droit à l'étude signifie que les personnes vivant au Mexique, en Inde ou +en Malaisie peuvent étudier le même code qui est utilisé en Europe ou aux +États-Unis. Ce qui veut dire qu'on ne les empêche pas d'apprendre comment +les autres ont réussi. +</p> +<p> +Il faut garder à l'esprit que beaucoup de programmeurs travaillent avec la +contrainte qu'il leur est interdit de voir le code d'autres +programmeurs. Plutôt que de se hisser sur les épaules de leurs +prédécesseurs, ce qui reste la meilleure façon d'avancer et de voir plus +loin, ils se retrouvent la tête dans le sac. Le droit d'étudier, c'est le +droit de voir plus loin, de progresser, du haut des épaules de géants. +</p> +<p> +En outre, le droit d'étudier signifie que le logiciel lui-même doit être +disponible sous une forme qui soit lisible par vous et moi. +</p> +<p> +Un logiciel se présente sous deux formes, l'une qui est lisible uniquement +par les ordinateurs et l'autre qui est lisible par les gens. La forme que +l'ordinateur peut lire est celle qu'il exécute. C'est ce qu'on appelle un +binaire, ou exécutable. La forme qu'un humain peut lire s'appelle le code +source. C'est ce que crée un programmeur humain, pour être ensuite traduit, +par un autre programme d'ordinateur, en binaire ou exécutable. +</p> + +<p> +Le droit suivant, celui de modifier, est le droit de corriger un problème ou +d'apporter des améliorations. Pour la plupart des gens, cela signifie le +droit que vous avez, vous ou votre organisation, de payer quelqu'un pour +faire le travail à votre place, à peu près comme vous payez un mécanicien +pour réparer votre voiture ou un charpentier pour agrandir votre maison. +</p> +<p> +Les modifications sont d'une aide certaine. Les développeurs d'applications +ne peuvent pas penser à toutes les façons dont les utilisateurs feront usage +de leurs logiciels. Les développeurs ne peuvent pas prévoir les nouvelles +contraintes auxquelles leur code sera soumis. Ils ne peuvent pas anticiper +toutes les conditions locales, par exemple qu'un Malais utilisera un +programme qui avait tout d'abord été écrit en Finlande. +</p> +<p> +Et pour en terminer avec ces droits, parlons de celui de redistribuer. +</p> +<p> +Cela signifie que vous, qui avez un ordinateur, une usine à logiciels, vous +avez le droit de faire des copies d'un programme et de le redistribuer. Vous +pouvez faire payer ces copies ou les distribuer gratuitement. D'autres +peuvent faire la même chose. +</p> +<p> +Bien sûr, plusieurs des gros fabricants de logiciels veulent vous empêcher +de vous servir votre propre bien. Ils ne peuvent pas gagner dans un marché +libre, alors ils attaquent autrement. Aux États-Unis, par exemple, on voit +de récentes propositions de lois qui vous ôtent votre liberté. +</p> +<p> +Le droit de redistribuer, tant qu'il est défendu et appliqué, signifie que +le logiciel est vendu au sein d'un marché concurrentiel, libre. Ceci a +plusieurs conséquences. Une des conséquences, c'est un prix bas, favorable +au consommateur. +</p> +<p> +Mais d'abord et avant tout, ces droits économiques et légaux amènent à +collaborer, un des thèmes de cette conférence. +</p> +<p> +Ce résultat est contraire aux attentes de pas mal de gens. Peu d'entre eux +s'attendaient à ce que dans un marché concurrentiel, libre, chaque +producteur devienne plus coopératif et qu'on ne sente ni ne voie de +compétition parmi les entrepreneurs en concurrence. +</p> +<p> +Plus un marché est concurrentiel, plus vous voyez de coopération. Cette +implication, qui va apparemment contre toute intuition, a été aussi bien +observée que déduite. +</p> +<p> +C'est possible parce que les gens ne sont pas lésés en faisant ce qu'ils ont +envie de faire. Les gens aiment aider leurs voisins. +</p> +<p> +Prenez un petit fermier, un parmi un million. Mon ami George, chez moi aux +États-Unis, est un de ceux-là. +</p> +<p> +Sa récolte est tellement maigre qu'il ne peut rien faire sur les prix au +niveau mondial. Son voisin est dans la même situation. +</p> +<p> +Du coup, si George aide son voisin, c'est profitable à son voisin et George, +lui, ne perdra rien sur ce que lui rapporte sa récolte. +</p> +<p> +À partir du moment où George n'y perd rien, il a toutes les raisons d'aider +son voisin. George n'est pas simplement serviable, il a compris que s'il +donne un coup de main à son voisin, ce dernier lui renverra probablement +l'ascenseur. +</p> +<p> +Voilà ce que vous observez dans un marché concurrentiel libre : de la +coopération. +</p> +<p> +Une compétition visible indique que le marché n'est pas complètement libre +et concurrentiel. Une compétition visible, cela veut dire qu'au mieux vous +n'avez qu'un marché semi-libre. +</p> +<p> +Allons plus loin : si un logiciel est vendu sur un marché libre, la +concurrence entre les fournisseurs va faire tomber les prix, ce qui va +profiter aux non-programmeurs. +</p> +<p> +Voyons les choses autrement : le prix d'un logiciel est déterminé en premier +lieu par des considérations juridiques, par le degré de liberté dont +profitent les acheteurs. Si ceux-ci ont l'interdiction d'acheter un produit +sauf à prix élevé et que cette prohibition soit rendue effective, le produit +sera cher. C'est ce qui se passe aujourd'hui avec beaucoup de logiciels +privateurs.<a id="TransNote1-rev" href="#TransNote1"><sup>1</sup></a> +</p> +<p> +Par contre, si le produit est mis en vente sur un marché libre, la +concurrence entre les fournisseurs en fera baisser le prix. +</p> +<p> +Et vraiment, il y aura des cas où les prix seront tellement bas que des +sociétés ou d'autres organisations donneront les cédéroms contenant les +logiciels ; d'autres feront des copies pour leurs amis ; et d'autres encore +les mettront en téléchargement sur Internet, gratuitement. +</p> +<p> +Cela signifie que le logiciel lui-même, support nécessaire à un projet +communautaire ou marchand, deviendra à la fois peu coûteux et légal. +</p> +<p> +Placez-vous du point de vue d'une PME ou d'une association locale. Elle +pourrait utiliser un logiciel privateur diffusé via une distribution +restrictive et alors, soit payer une somme qu'elle n'a pas, soit enfreindre +la loi et le voler. +</p> +<p> +En revanche, le logiciel libre est bon marché et légal. Il est plus +accessible. Il est aussi personnalisable, plus que ne peuvent l'être les +logiciels restrictifs. Il donne de l'autonomie. +</p> +<p> +Nous façonnons le développement de cette technologie, nous créons la +collaboration à travers l'utilisation d'un outil juridique, une licence, qui +vous donne plus de droits que vous n'en auriez autrement, qui vous interdit +d'interdire, ce qui, dans ce cas, vous donne le droit de copier, étudier, +modifier et redistribuer le logiciel. +</p> +<p> +Parce qu'y sont associées des libertés, ce logiciel est appelé « logiciel +libre » <cite>[free software]</cite>. +</p> +<p> +Pendant que j'y suis, laissez-moi éclaircir un terme qui parfois induit en +erreur les anglophones. +</p> +<p> +Le faible coût du logiciel libre fait croire à certains anglophones que le +mot <cite>free</cite> dans l'expression <cite>free software</cite> (logiciel +libre), signifie gratuit. Non, <cite>free</cite> est pris dans le sens de <a +href="/philosophy/open-source-misses-the-point.html">libre</a>, mais il est +facile de faire la confusion.<a id="TransNote2-rev" +href="#TransNote2"><sup>2</sup></a> Après tout, j'ai parlé de consommation +modeste des ressources, de logiciel peu coûteux. +</p> +<p> +Le mot anglais <cite>free</cite> a plusieurs sens. Comme me le disait un +jour un ami mexicain, dirigeant par ailleurs d'un gros projet de logiciel +libre : +</p> +<blockquote><p> +Il y a quelque chose qui ne va pas dans la langue anglaise ; elle ne sait +pas faire la différence entre une « bière gratuite » et la « libre +expression ». +</p></blockquote> +<p> +L'espagnol, au contraire, fait la distinction entre <cite>gratis</cite> et +<cite>libre</cite> (se prononce à peu près « libré ») ; <cite>free +software</cite> se dit <cite>software libre</cite>. +</p> +<p> +De même, la langue de nos hôtes, le bahasa Melayu,<a id="TransNote3-rev" +href="#TransNote3"><sup>3</sup></a> fait la distinction entre +<cite>pecuma</cite> et <cite>kebebasa</cite>. Un logiciel libre est un +logiciel <cite>kebebasa</cite>. +</p> +<p> +Entre parenthèses, Éric Raymond et Bruce Perens ont inventé il y a quelques +années le terme « open source » (sources accessibles, ouvertes) comme +synonyme de « logiciel libre ». Ils voulaient modifier la mauvaise opinion +qu'avaient certaines sociétés du marché du libre. Le terme est devenu +courant. Éric et Bruce ont atteint leur but. +</p> +<p> +Cependant, je préfère le terme de « logiciel libre », qui transmet mieux +l'objectif de liberté ; cette proposition que chaque homme, chaque femme, +même vivant dans un pays du tiers-monde, a le droit de faire un travail +rémunérateur, et qu'on ne doit pas le lui interdire. +</p> +<p> +J'ai mentionné le fait qu'une communauté ou une collectivité peut utiliser +un logiciel bon marché et légal. +</p> +<p> +Maintenant, laissez-moi vous parler de l'industrie logicielle elle-même. +</p> +<p> +Parce que la concurrence dans un marché concurrentiel pousse vers le bas le +prix des logiciels libres, personne ne s'engage dans l'industrie logicielle +pour vendre des logiciels en tant que tels. Par contre, et cela est souvent +méconnu, il est possible de gagner de l'argent par d'autres moyens. +</p> +<p> +Les sociétés et les personnes impliquées dans l'industrie logicielle ne +vendent pas les logiciels en eux-mêmes, mais plutôt les services associés au +logiciel, au matériel ou à d'autres solutions. +</p> +<p> +C'est ce qui se passe dans les professions médicales ou juridiques. Aussi +bien la connaissance médicale que le droit sont librement +redistribuables. Médecins et juristes vendent leurs services pour résoudre +des problèmes. +</p> +<p> +De quels services est-ce que je veux parler ? Le plus évident : aider à se +servir d'un ordinateur ou, pour prendre des exemples plus précis, mettre en +place un réseau de radiocommunication par paquets dans un endroit où il n'y +a pas de téléphone, ou encore créer et entretenir une base de données pour +un entrepôt. +</p> +<p> +Exemple moins évident, les sociétés qui vendent des téléphones ou des usines +pour le dessalement de l'eau ajoutent de plus en plus souvent du logiciel à +leurs produits pour les rendre plus attrayants aux yeux des acheteurs. +</p> +<p> +Notez que les programmeurs écrivent eux-mêmes des logiciels pour quatre +raisons principales : d'abord, ils sont payés pour résoudre un problème, +tout comme un juriste est payé pour rédiger un contrat. Ensuite, il peut +s'agir d'une partie d'un autre projet. Troisièmement, pour accroître leur +réputation et finalement, parce qu'ils en ont envie. +</p> +<p> +J'ai parlé du façonnage de cette technologie pour favoriser la +collaboration. La clef, c'est la liberté et la création d'un cadre légal qui +favorise la liberté. +</p> +<p> +Maintenant, j'aimerais aborder les projets qui mènent à la prospérité. +</p> +<p> +Un des problèmes a trait aux ressources, ou plutôt à leur absence. +</p> +<p> +Comme je l'ai dit plus haut, les logiciels libres réduisent les barrières à +l'entrée, que ce soit dans l'industrie logicielle elle-même ou dans les +autres industries et activités. +</p> +<p> +Le logiciel libre, la culture de coopération et la manière de penser qui va +avec, permettent de réduire les coûts d'exploitation. +</p> +<p> +Permettez-moi de prendre un exemple tiré tout droit de cette +conférence. Tout d'abord, je dois vous dire que j'ai des correspondants un +peu partout dans le monde. Ils ne vivent pas tous dans des pays +riches. Eux-mêmes ou les institutions qui les financent ne sont jamais très +riches. +</p> +<p> +Les premiers messages que j'ai reçus à propos de cette conférence ont +utilisé plus de quatre fois et demie les ressources nécessaires à la +circulation de l'information. Ils ont été envoyés sous forme inutilement +volumineuse. +</p> +<p> +La prochaine fois que vous aurez à budgétiser un projet, imaginez le payer +quatre fois et demie son prix. Réfléchissez alors à la manière dont vous +allez le financer. +</p> +<p> +La prochaine fois que vous paierez l'addition, sortez quatre fois et demi +plus d'argent de votre poche… +</p> +<p> +Pour moi, l'utilisation des ressources n'est pas un problème, puisque la +télécommunication ne m'est pas facturée à la minute comme c'est souvent le +cas. Mais je sais que mes correspondants de par le monde préfèrent que je +fasse attention à mes communications, que je ne gaspille pas leur argent ni +celui des institutions qui les financent. +</p> +<p> +L'une des caractéristiques remarquables des logiciels libres est qu'ils +peuvent tourner sur de vieilles machines aux capacités modestes, comme je +l'ai mentionné tout à l'heure. Par exemple, il y a quelques mois, j'ai lancé +sur le 486 de ma sœur un gestionnaire de fenêtres, un navigateur web +graphique et un programme de manipulation d'images. Tout cela a parfaitement +fonctionné. +</p> +<p> +Les éditeurs de texte, les programmes de courrier électronique et les +tableurs demandent encore moins de ressources. +</p> +<p> +Cette frugalité signifie que les gens peuvent utiliser le vieux matériel qui +a été mis au rebut par les plus grandes sociétés mondiales. Ce matériel +n'est pas cher, souvent même offert. Les ordinateurs ont besoin d'être +transportés. Vous aurez parfois à prévoir localement de retaper le matériel +et de le remplir de logiciels libres, peu coûteux et personnalisés. Pour +l'utilisateur final, ces machines coûtent moins qu'une machine neuve. +</p> +<p> +Par ailleurs, les constructeurs fabriquent des ordinateurs modernes bas de +gamme qui en font tout autant que les vieux et ne sont pas trop chers. +</p> +<p> +Ce n'est pas la peine d'acheter un matériel onéreux, flambant neuf, pour +faire tourner vos logiciels. +</p> +<p> +En conclusion… +</p> +<p> +On m'a demandé de parler sur : +</p> +<p> +« Façonner le développement et les projets collaboratifs dans les TIC pour +la prospérité mondiale ». +</p> +<p> +Ces 16 dernières années, je les ai passées à travailler avec des gens qui +ont façonné le logiciel grâce à un outil juridique qui vous donne maintes +libertés : celles de copier, étudier, modifier et redistribuer le logiciel. +</p> +<p> +Cet outil façonne la technologie logicielle pour la rendre plus accessible +et en faire un instrument plus efficace d'autonomie ; il encourage les gens +à travailler en collaboration et offre une technologie qui permet une +meilleure gouvernance. +</p> +<p> +Cet outil juridique signifie que les sociétés impliquées dans les TIC sont +en concurrence non pas pour le logiciel lui-même, mais pour la vente de +services associés au logiciel ou la vente de matériel ou d'autres solutions. +</p> +<p> +Ce cadre juridique veut dire que les sociétés offriront des services plus +fiables et plus efficaces. +</p> +<p> +La liberté, garantie par une licence adéquate, signifie que les gens qui +utilisent les ordinateurs ou les télécommunications comme outils peuvent +prendre pied dans leur industrie plus facilement. +</p> +<p> +Cela signifie que tous les usagers peuvent réduire leurs coûts +d'installation et d'exploitation, ce qui implique que les gens vivant dans +des pays plus pauvres n'envoient pas leur argent aux pays riches, mais +qu'ils le maintiennent dans leur économie locale. +</p> +<p> +De plus, comme je l'ai dit plus haut, les licences logicielles de la +distribution restrictive forcent souvent les gens à choisir entre violer la +loi et payer une somme qu'ils n'ont pas. +</p> +<p> +Par souci de bonne gouvernance, un pays ne devrait pas forcer les personnes +qui tentent de travailler décemment à prendre une telle décision. Trop +souvent, une personne par ailleurs respectueuse des lois, mais sans grandes +ressources, choisira de violer la loi. +</p> +<p> +Ce pays devrait plutôt faire en sorte qu'agir dans le respect des lois soit, +sans discussion, le meilleur choix, à la fois pour des raisons légales, +morales et pratiques. On s'attend toujours à ce que son voisin soit +respectueux des lois et honnête ; c'est ce qu'encourage le logiciel libre. +</p> +<p> +Le logiciel libre donne la maîtrise de leur vie à ceux qui étaient laissés +pour compte. +</p> + +<div class="translators-notes"> + +<!--TRANSLATORS: Use space (SPC) as msgstr if you don't have notes.--> +<hr /><b>Notes de traduction</b><ol> +<li id="TransNote1">Autre traduction de <cite>proprietary</cite> : +propriétaire. <a href="#TransNote1-rev" class="nounderline">↑</a></li> +<li id="TransNote2">Cette confusion est peu probable en français, car on +peut difficilement donner à « libre » le sens de gratuit. Et pourtant, la +première réaction des gens à qui l'on parle de logiciel libre est souvent : +« Ah oui, les logiciels gratuits ? » <a href="#TransNote2-rev" +class="nounderline">↑</a></li> +<li id="TransNote3">Malais (groupe de langues très proches les unes des +autres). <a href="#TransNote3-rev" class="nounderline">↑</a></li> +</ol></div> +</div> + +<!-- for id="content", starts in the include above --> +<!--#include virtual="/server/footer.fr.html" --> +<div id="footer"> +<div class="unprintable"> + +<p>Veuillez envoyer les requêtes concernant la FSF et GNU à <a +href="mailto:gnu@gnu.org"><gnu@gnu.org></a>. Il existe aussi <a +href="/contact/">d'autres moyens de contacter</a> la FSF. 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